2017 : L’inauguration de la rue « Pierre Déjean » à Auch le 18 novembre

Lun06Nov201709:42

2017 : L’inauguration de la rue « Pierre Déjean » à Auch le 18 novembre

 

 

… une invitation de M. le Maire, une rencontre « inter générations »

 

 

 

 

 

Le programme :

 

11 heures : inauguration « officielle », dévoilement des deux plaques

- Intervention de M. le Maire d’Auch et de M. Cédric Disconsi, responsable du groupe EEDF


12 heures : hommage à Pierre Déjean

- Intervention de M. Yvon Bastide, président de l’association pour l’histoire du scoutisme laïque

« Pierre Déjean, une personnalité, un symbole »


13 heures et l’après-midi :

Activités du groupe EEDF sur le thème « Pierre Déjean »


L’ouvrage « Pierre Déjean, notre frère » est disponible en ligne sur http://fr.calameo.com

Le texte des interventions sera disponible sur le site http://www.histoire-du-scoutisme-laique.fr/

 

 


 

Intervention de Cédric Disconsi, responsable du groupe d’Auch :

 

 



 

 

Intervention de M. le Maire d’Auch :

 

 

 

Inauguration de la rue Pierre DÉJEAN

Samedi 18 novembre 2017

Monsieur le président de l’Association pour l’histoire du scoutisme laïque,

Mesdames, Messieurs les responsables des Éclaireuses et Éclaireurs de France,

Mesdames, Messieurs les élus,

Mesdames, Messieurs,

Nous sommes réunis aujourd'hui pour célébrer le souvenir d'un homme d'exception, d'une personnalité exemplaire qui a profondément marqué tous ceux qui l’ont côtoyé.

Né à Auch en juillet 1912, Pierre DÉJEAN et son frère Léo rejoignent en 1922 la troupe des Éclaireurs d'Auch, mouvement du scoutisme laïque dont ils partagent tous deux immédiatement les valeurs et les rituels.

Son engagement dans le scoutisme influencera profondément la personnalité de Pierre DÉJEAN et les idéaux humanistes qu’il y forgera trouveront vingt ans plus tard leur traduction politique et éthique au sein de la Résistance à l’occupant allemand.

En 1925, un drame va bouleverser sa vie. Victime d'un terrible accident, Pierre DÉJEAN, alors âgé de 13 ans, est amputé d’une jambe. Désespéré dans un premier temps, le jeune adolescent va vite se ressaisir sous la houlette de son père et démontrer un courage et une force de caractère exceptionnel en poursuivant ses activités dans le mouvement malgré son handicap et sa souffrance.

Au fil du temps, celui-ci prend de plus en plus de responsabilités au sein des Éclaireurs, jusqu’à être appelé à Paris pour devenir l’adjoint permanent au niveau national pour l’animation technique du mouvement, en 1938.

Durant l’occupation, Pierre DÉJEAN reste à Paris, au siège des Éclaireurs de France, au 66, rue de la Chaussée-d’Antin. Là, il continue à organiser les activités des groupes éclaireurs de la zone occupée, souvent sous couvert de stages organisés par la Croix-Rouge, juste pour ne pas alerter les autorités.

Mais en parallèle, il est également résistant au sein du réseau Mithridate, surtout centré en Bretagne.

Le 3 septembre 1943, la police allemande vient l’arrêter dans les locaux parisiens de l’association. Pierre DÉJEAN a juste le temps de prendre le petit baluchon qu’il avait préparé avant d’être emprisonné à Fresnes.

De là, il envoie des messages à sa femme, Jeanne, sur des feuilles de papier à cigarettes cousues dans la couture de ses gants de toilette. Il est ensuite transféré à Rennes puis à Compiègne avant d’être déporté dans le camp de concentration de Mauthausen d’où il ne reviendra jamais.

Pierre DÉJEAN était un homme de conviction, un homme de caractère aussi. Enfant de la République laïque, il ne transigeait pas sur ses valeurs. Il ne se contentait pas de les proclamer, il les faisait vivre au quotidien.

Quand il s’est engagé dans la Résistance, il n’a écouté que sa conscience morale et son attachement à la liberté. Il en connaissait pourtant le risque, mais n’a pas hésité.

La justice sociale, l’égalité et la solidarité étaient ses vertus cardinales. La probité, l’honnêteté et la droiture étaient les principes qui guidaient sa vie et sa conduite en toute occasion.

Pierre DÉJEAN incarnait parfaitement les valeurs du scoutisme laïque dont le but est, rappelons-le, de contribuer par l’éducation à la formation de citoyens libres, responsables, solidaires et engagés.

La Ville d’Auch est fière de rendre hommage à l’Auscitain Pierre DÉJEAN, en inscrivant son nom dans notre géographie communale pour saluer sa mémoire avec toute notre admiration et notre respect.

Trouvons dans la force de son exemple, la plus haute exigence de notre conduite citoyenne, pour aujourd’hui et le monde de demain que nous avons à construire !

Permettez-moi de terminer par ces mots de l’écrivain Elie Wiesel, rescapé des camps de la mort, que nous devons avoir à l’esprit chaque fois que nous rendons hommage aux résistants. Je le cite : « Nous devons toujours prendre parti. La neutralité aide loppresseur, jamais la victime. Le silence encourage le persécuteur, jamais le persécuté. »

Je vous remercie.

 


 

 

Intervention de Jean-François DÉJEAN,

fils de Pierre Déjean

 

Monsieur le Maire,

Mesdames et Messieurs les conseillers municipaux,

Mesdames et Messieurs,

 

Chers amis,

 

Je tiens tout d’abord à vous adresser, Monsieur le Maire, mes plus vifs remerciements pour l’accueil favorable que vous avez réservé à notre demande de voir le souvenir de Pierre DÉJEAN honoré par l’attribution de son nom à une rue de sa ville natale. Je remercie également les membres du conseil municipal, pour leur soutien dans cette décision, et votre équipe technique dans la réalisation de ce projet.

 

Né en septembre 1940, aux heures les plus sombres de notre histoire, je garde un souvenir très ténu de mon père. A mesure que le temps nous a éloigné, puis séparé, la force de sa présence morale n’a cessé de me tenir, de me montrer l’exemple.

 

Dès ses jeunes années, au sein des Éclaireurs de France, il a manifesté son attachement aux valeurs humanistes du scoutisme. Sa volonté de vivre, décuplée par son grave accident, son enthousiasme, son dynamisme, son engagement permanent pour la liberté, la fraternité et la laïcité l’ont amené à prendre toute sa part dans la résistance au nazisme. Lucide et vigilant, il savait, depuis les années 30, les dangers mortels qui menaçaient notre démocratie.

 

Unis par le même idéal, mon père et ma mère, Jeanne, ont pleinement assumé le choix fondamental du combat pour la liberté.

Mon frère et moi protégés par notre mère, Pierre a mené de front, dans la clandestinité, l’animation des groupes EDF dans la zone nord et des missions secrètes de renseignement pour la FRANCE LIBRE et ses Alliés, au sein du réseau « Mithridate ».

 

Il fut arrêté, sur dénonciation, le 2 septembre 1943, au siège parisien des Eclaireurs de France. Emprisonné à FRESNES, puis à RENNES pendant des mois, il put recevoir plusieurs fois la visite de son épouse.

 

Transféré au camp de Royallieu proche de Compiègne, il fut ensuite déporté au camp de concentration de MAUTHAUSEN le 6 avril 1944.

Exterminé par les nazis le 18 août 1944, il fut gazé au centre d’euthanasie de château de Hartheim, annexe du camp de MAUTHAUSEN.

 

Je vous remercie de votre attention.

 



 

 

Le dévoilement des plaques, celle de la rue

et celle qui rappelle le nom de tous les E.D.F. morts pour la France :

 

 

 


 


 

La présentation de « Pierre Déjean, une personnalité, un symbole » :

 

 

Pierre Déjean, notre frère,

Vie et mort d’un mousquetaire laïque résistant, assassiné par les nazis…

Auch 1912 – Mauthausen 1944

 

 

Une personnalité, mais aussi … un symbole

 

Une personnalité…

 

*   auscitaine

Né rue d’Alsace, dans une famille auscitaine, Pierre a vécu Cours de la Somme

 

*   courageuse

Amputé d’une jambe à 13 ans suite à un accident, a su surmonter son handicap et les douleurs qui en résultaient

 


*   scoute,

d’abord localement et régionalement,

Participation à un « groupe local », animé par des bénévoles en charge du recrutement et de l’organisation des activités sous toutes leurs formes ; participation à l’organisation de « camps-écoles » et d’activités régionales ;

 


puis nationalement, comme « commissaire national adjoint » en charge de la branche « éclaireurs », animation et formation de l’ensemble du Mouvement, rédaction d’articles pour les revues.

 


*   engagée :

 

Dès 1920, dans le syndicalisme étudiant à Toulouse.

 

Dès 1940 et la défaite, son engagement personnel est décrit par un témoignage de Jeanne Déjean, son épouse ; il sera prolongé en 1942 et 1943 par sa participation au réseau Mithridate.

 

 

 


Dénoncé, arrêté au siège des E.D.F., il sera emprisonné à Rennes et à Compiègne avant d’être condamné à la déportation. À Mauthausen, il rejoindra à Hartheim une clinique chirurgicale transformée en laboratoire de recherche. Il y sera assassiné le 18 août 1944.


La revue « Le chef », organe officiel des responsables Éclaireurs de France, annonce en août 1945 :

« Une grande flamme s’éteint et tout soudain s’assombrit. Notre frère joyeux ne chantera plus, notre frère véhément ne tonnera plus, notre frère aimant ne sourira plus. Il nous vivifiait, et la vie même disparaît avec lui. »


Mais aussi…


Un symbole


Celui de l’engagement du scoutisme laïque contre le nazisme et le régime de Vichy

 


Engagement personnel

dans le cadre de son activité scoute en zone occupée où le scoutisme était interdit…

Une lettre de mars 1941 décrit très bien l’action pilotée par Pierre Déjean pour un scoutisme « clandestin » et des illustrations le décrivent…

 

 

Engagement partagé, aussi bien au niveau national qu’au niveau local :

 

 

En zone dite libre,

 

Trois responsables nationaux hébergent des jeunes Juives camouflées (et membres des Éclaireuses) : Elizabeth et Pierre François, Henriette et René Duphil ont reçu à ce titre la « Médaille des Justes » le 31 mai 2011.

Le témoignage d’Annette Dennery, hébergée par la famille Duphil :

«  J’ai vécu à Vichy de septembre 1940 à février 1945, et j’ai côtoyé, en petite fille juive, les grands et les moins grands de la « capitale » de la France à ce moment-là(…) ... et nous sommes tous absolument conscients que ma famille et moi-même devons la vie aux Éclaireurs de France ».

 

Plusieurs membres de l’équipe nationale ont rejoint les maquis.

 

Dans les régions, les engagements sont nombreux et, la plupart du temps, connus des responsables.


Quelques exemples… des personnalités mais aussi des membres « de base » :


Jean Estève, responsable régional Provence

-       Rejoint un maquis des « Hautes Alpes ».

-       Y crée les « maquis écoles » du M.L.N. sur le modèle des « camps écoles » des EDF.

-       Déporté à Dachau.

-       Futur C.N.E. et C.G. des EDF et EEDF.

Louis François, responsable local Lyon

-       Rejoint la Résistance dès 1941.

-       Recrute Pierre Brossolette.

-       Est en contact avec C. de Gaulle.

-       Futur Président des EDF et EEDF.

Lucien Fayman, responsable local Toulouse

-       Rejoint les E.I. dès 1941.

-       Anime « la 6e » clandestine et organise l’accueil de jeunes Juifs de toutes origines.

-       Futur Président des E.I.

« C’était après la sortie des lois raciales de Pétain : les lois sont d’octobre et c’était en décembre 40 ou début 41. En tête-à-tête avec moi-même, je me suis dit : “ Le scoutisme oui, mais je me sens appartenir à ce groupe Juif et ne pas les rejoindre serait, à mes yeux, une démission. ” »

Violette Maurice, responsable locale Saint-Étienne

-       Crée un groupe de Résistance.

-       Arrêtée, parvient à communiquer (Morse).

-       Déportée à Ravensbruck.

Rosine Crémieux, responsable locale Hautes-Alpes

-       Infirmière au maquis du Vercors.

-       Déportée à Ravensbruck.

Claude Berthié, responsable à Lyon,

-      membre de l’Armée secrète

-      parachuté en Allemagne

Maria Couillens, éclaireuse à Toulouse,

-      héberge une jeune fille juive dans sa famille,

-      « médaille des Justes »

Marguerite et René Pellet, responsables de groupe à Lyon,

-      accueil de jeunes Juifs,

-      morts pour la France

Le clan de Quimper

-      engagé dans un maquis,

-      Croix de guerre

Emmanuel Gibaja, engagé dans les Forces Françaises Libres,

-      « scout idéal autant qu’ardent combattant »                                                 etc.


Et aussi


L’accueil en France, en 1943, de Jean-Louis  Fraval, envoyé (par parachute !) de Claudius-Petit (ancien E.D.F.) du gouvernement provisoire d’Alger pour rencontrer les responsables des Mouvements en vue de la Libération. Contacts organisés par André Basdevant, C.N. E.D.F., secrétaire du Scoutisme Français, avec la quasi-totalité des responsables nationaux des Mouvements.

Anecdote : passage par un « Cappy Route » à Chamarges…


Sans oublier les autres EDF auscitains morts pour la France :


-   Guerre 1939/1940 : Émile Esquirol ; Pierre Sagazan ; Claude Verges.

-   Maquis : Jean Brunet, maquis de Miélan ; Louis Durrieux, maquis de Viélla ; Jean Perri, maquis de Mielan.

-   Combats avec les Forces Françaises Libres : Robert Lubespère ; Pierre Mendousse.

Des engagements dont la « quantification » est difficile, mais importante pour le scoutisme, pour deux raisons :


* La crédibilité du scoutisme, proposition d’une nouvelle manière d’éduquer…

Quel en est le résultat après une génération (1910-1940) ?


*  L’image du scoutisme, compliquée par sa dépendance de la politique Jeunesse de l’État,

avec des engagements clandestins donc non visibles…

 

Conséquence :

Nécessité de rétablir une vérité par rapport à certaines affirmations d’historiens… approximatifs

 

Exemples :

 

« Le scoutisme s’est donné corps et âme à la révolution nationale ». Pierre Gioletti, « Histoire de la Jeunesse sous Vichy »  - Perrin, 1991

 

« La jeunesse embrigadée au service du régime » - camp des Milles, 2017 :

 


 

Conclusion :

 

Pierre Déjean a bien été – et est  toujours – le symbole de cette démonstration du rôle majeur de notre scoutisme

pour l’éducation à la citoyenneté.

 

Merci Pierre !


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