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2011 : À l’issue de ce parcours d’un siècle…

Que pouvons-nous conclure ?

 


Tout d’abord, que le scoutisme, en France, apparaît comme un moyen de répondre à un ensemble de besoins des jeunes – besoins qui ne se présentaient pas d’une manière réellement homogène :
– préoccupations sociales pour un pasteur implanté en milieu ouvrier, Georges Gallienne,
– complément pédagogique pour un directeur d’école privée bourgeoise, Georges Bertier,
– formation de la personnalité pour un idéaliste, Nicolas Benoît,
– complément à la formation militaire pour quelques officiers, comme le Colonel Royer,
– intérêt pour les voyages et les explorations pour Paul Charpentier,
– complément à l’esprit sportif et olympique pour Pierre de Coubertin,
– outil d’émancipation de la jeune fille pour Antoinette Fuchs ou Marguerite Walther…
On ne peut que constater que ces précurseurs aux objectifs divers savent créer, à la fois, une dynamique et une structure, ce qui permet de mettre en place une réalité scoute très peu de temps après 1907.

Il convient de s’arrêter sur un point qui n’est pas mineur et qui marque la première décennie de cette histoire : ces débuts ne sont pas facilités par l’opposition marquée par les dignitaires de la religion dominante aux principes mêmes de ce scoutisme, considéré comme dangereux pendant près de dix ans. Si le scoutisme des débuts, dans sa majorité, se déclare « non confessionnel », il sait accueillir des pratiquants de toutes les religions de notre pays en même temps que des non – pratiquants. Cette solution d’une ouverture à tous, sans distinction ni obligation, aurait pu créer un lieu d’accueil commun mais son principe est rejeté, à la fois par la création immédiate d’une association d’inspiration protestante et, par la suite, une fois passé le temps de la réflexion, de puissantes associations catholiques : la dispersion a donc été un fait, mais elle n’est pas imputable aux associations non confessionnelles, qui ont continué de recevoir, sans problème majeur, tous les jeunes – pratiquants ou non – qui le souhaitaient. Dans le même temps, le scoutisme féminin, apparu très vite, met en place une formule originale de « sections » juxtaposées qui a démontré toute sa valeur.

 
À partir de la deuxième décennie, la création d’associations catholiques, drainant une bonne partie de la jeunesse pour laquelle le scoutisme apparaît comme un complément dans un cursus de formation religieuse, va évidemment changer le recrutement des associations non confessionnelles. Cette étape, marquée par une personnalité hors du commun, celle d’André Lefèvre – catholique pratiquant resté toujours fidèle à une conception exigeante de la laïcité -, est, à la fois, celle de la confirmation du choix initial – celui du scoutisme et de sa « spiritualité » – et celle de l’ouverture. Ces deux orientations peuvent sembler contradictoires, elles ne le sont qu’en apparence : notre action se définit par rapport à un besoin, pas par rapport à ses moyens. Le scoutisme ne se limite pas à ses techniques et à ses rituels, il peut être adapté pour répondre à des besoins en dehors de ses propres structures : c’est ainsi que nos Mouvements deviennent, très vite, partie prenante totale de la construction d’une véritable « éducation populaire » à travers ses divers prolongements.

Cette volonté d’ouverture, qui marque la troisième décennie, ne se dément pas par la suite : adhésion aux grandes initiatives « morales » comme les « ligues », création des Centres d’entraînement aux Méthodes d’Éducation Active puis des Francs et Franches Camarades, développement du scoutisme dit d’extension en direction des handicapés physiques, sensoriels et mentaux, prolongement vers les jeunes inadaptés sociaux, intérêt particulier porté au scoutisme dans les pays colonisés, développement d’activités internationales ou, plus récemment, mise en place d’une pédagogie de l’écologie en sont des exemples continus. Cette période est également caractérisée par un rapprochement avec l’Éducation Nationale, sous l’impulsion de Pierre François et Albert Châtelet.

La quatrième décennie s’ouvre sur la période de la deuxième guerre mondiale, qui va poser de lourds problèmes de choix, aussi bien à l’association qu’à chacun de ses membres. Lors du bilan qui en sera fait à mi-parcours, il apparaîtra que ces choix ont été, en général, conformes aux valeurs de notre scoutisme et les illustreront : les personnalités de Pierre Déjean, Jean Estève ou Lucien Fayman en sont, entre autres, de lumineux exemples. 

L’immédiat après-guerre confirme la volonté d’ouverture – le projet « Francs et Franches Camarades », nom inventé par William Lemit, est dans les cartons de Pierre François depuis plusieurs années – et va la prolonger : bien sûr, le Mouvement, en 1945, confirme ses valeurs scoutes et participe efficacement à l’accueil de Lady B.P. et au jamboree de la Paix.

Mais, dans le même temps, la branche ainée connaît une évolution fondamentale, les autres branches s’orientent vers une formation concrète à la démocratie, l’association confirme qu’elle est « laïque comme l’école publique » et qu’elle se donne  pour but de « former des citoyens conscients des problèmes sociaux et soucieux de les résoudre ». L’étape suivante est celle de la coéducation des filles et des garçons, abordée avec un grand temps d’avance par rapport aux organisations mondiales… Le cinquantenaire, remarquablement organisé par René Duphil, Henry Gourin, Pierre Bonnet, Jean Estève – et quelques autres, concrétise les valeurs et les réalités de ce scoutisme laïque.

Sur le trajet, et, en particulier, au début des années 50 où le Mouvement se donne de nouveaux objectifs et de nouveaux principes d’animation, il est abandonné par un certain nombre de ses membres qui n’acceptent pas – ou ne comprennent pas – cette évolution. On peut considérer que, dans la plupart des cas, ce refus de s’associer aux choix résulte surtout d’une différence de conception du scoutisme lui-même, dont le fond peut rester même si la forme en est adaptée… Notons au passage que le scoutisme laïque a connu beaucoup moins de « dissidences » que le scoutisme confessionnel, peut-être, justement, parce qu’il ne s’accompagne pas d’exigences dogmatiques.

La suite confirme ces orientations, d’abord avec la création du « nouveau Mouvement » – les Éclaireuses & Éclaireurs de France – qui réunit, dans une seule association, l’ensemble du scoutisme non confessionnel, masculin ou féminin. Bien sûr, la fin des années 60 se traduit par une crise, interne et externe, qui touche tout le secteur « jeunesse » comme elle touche l’ensemble de la société. La remise à niveau est lente et souvent difficile, mais se fait avec une redéfinition progressive des activités, tout autant que des valeurs. L’organisation de fréquents rassemblements et de manifestations diverses contribue à l’affirmation d’une réelle volonté commune d’aller plus loin tout en tenant compte de l’évolution du monde. L’international, l’écologie, la solidarité en sont les maîtres-mots. La création, à la fin des années difficiles, du hameau de Bécours, appelé à assurer le relais du camp-école de Cappy, est un des moyens mis à la disposition de tous pour témoigner de la vitalité de cette pédagogie.

Les trois dernières décennies de ce premier siècle si bien rempli redonnent au Mouvement, dans des conditions « extérieures » souvent difficiles, une dynamique qui lui permet d’aborder, en digne successeur, le deuxième siècle du scoutisme laïque en France.


En guise de conclusion… finale !

NOTRE MOUVEMENT ET SA LAÏCITÉ ONT INVENTÉ  LE SCOUTISME EN FRANCE

Il l’ont adapté à notre culture,
Ils ont accompagné et quelquefois précédé les évolutions positives de notre Société

(démocratie, coéducation, droits de l’enfant,  ouverture aux autres, respect de la nature).

Ils ne l’ont jamais mis au service d’un dogme, d’une doctrine ou d’une idéologie

autre que celle des  « DROITS HUMAINS ».

Ils lui ont donné, tout au long de dix décennies, le rôle que lui avait fixé nos fondateurs :

former les jeunes à la citoyenneté

… ET ILS CONTINUENT…

POUR UN DEUXIÈME SIÈCLE DE SCOUTISME LAÏQUE

Information : la rubrique « Notre centenaire » a été créée tout d’abord pour rendre compte des festivités du centenaire, mais sa fonction a été élargie : elle présente des apports sur toutes les étapes de notre histoire au cours de ces cent ans, telles que vécues par les groupes ou les unités.