Henri Joubrel a été, à partir de son service localisé au siège national des E.D.F., un pionnier de la recherche et de l’action dans le secteur de l’enfance et de la jeunesse « socialement inadaptée ».
À un moment où le problème de la jeunesse « délinquante » devient un sujet majeur de société, il est intéressant de rappeler son action et quelques-un de ses écrits nés d’une indéniable expérience « de terrain », ainsi que sa participation à la création de l’Association nationale des éducateurs de jeunes inadaptés (A.N.E.J.I.) puis de plusieurs structures internationales.
La vie d’Henri Joubrel
Jacques Guyomarc’h, éducateur spécialisé, président d’honneur de l’Association nationale des Éducateurs de Jeunes Inadaptés, a écrit un texte sur «la vie d’Henri Joubrel» dont nous extrayons les pages suivantes.
Henri Joubrel est né à Vannes (Morbihan) le 18 mars 1914. En 1925, il entre dans le scoutisme, aux Éclaireurs de France. Il aura ainsi l’occasion de participer à 15 ans au jamboree Mondial des Éclaireurs de Birkenhead en Grande-Bretagne, et, plus tard, à ceux de Hongrie, des Pays-Bas et de Suède. À 17 ans, il crée un groupe E.D.F. avec des élèves du lycée de Saint-Brieuc. En 1931, il poursuite ses études à la Faculté de Droit de Rennes, où il fonde un autre groupe E.D.F. au lycée de cette ville.
En 1934, élu premier secrétaire de la Conférence du stage des avocats, à la Cour d’Appel de Rennes, il plaide des affaires de mineurs. En 1939, il est reçu Docteur en droit, ainsi qu’à l’examen d’entrée dans la magistrature. Il sera magistrat jusqu’au 31 décembre 1941. À cette date, il abandonne volontariement ses fonctions. S’ouvre alors pour lui ce que l’on peut appeler sa carrière sociale.
Ému par le sort de milliers de jeunes Français mis en prison pour des délits divers à la suite de l’exode de 1940 et de l’occupation allemande, il s’associe au mouvement qui prend corps en faveur d’un traitement éducatif, et non plus pénitentiaire, de ces enfants et adolescents.
Il s’intéresse à l’expérience, audacieuse à l’époque, qui a vu le jour à Ker Goat, près de Dinan (Côtes du Nord) en 1940. Il se met à la disposition des E.D.F. qui fonctionnent clandestinement sous le couvert des Centres d’entraînement aux méthodes d’éducation active. Il se consacré dès lors exclusivement à susciter, encourager, soutenir la réforme des méthodes appliquées aux mineurs délinquants. En 1945, il sera nommé Commissaire national des E.D.F. pour la sauvegarde de l’Enfance.
Quinze années de suite (1945-1959), il va organiser à Paris le cycle des conférences de « Méridien ». Il réalise également chaque année, à partir de 1945, un stage national de perfectionnement destiné aux éducateurs spécialisés, mais aussi aux autres travailleurs sociaux. C’est à l’occasion d’un de ces stages que sera créée, sous son impulsion, l’Association nationale des éducateurs de jeunes inadaptés (A.N.E.J.I.), dont le rôle sera déterminant pour faire de l’éducateur spécialisé un professionnel à part entière à côté des assistantes sociales, des magistrats pour enfants, des médecins spécialisés, des psychologues, des enseignants spécialisés. Henri Joubrel sera le délégué général de l’A.N.E.J.I. jusqu’en 1961, il en sera ensuite vice-président.
La dimension internationale de son action commence en 1948, avec une rencontre franco-allemande sur « les problèmes de l’éducation des jeunes inadaptés ». Ces rencontres en Allemagne, élargies les années suivantes grâce à la venue de représentants de plusieurs autres pays, donnent naissance, en 1951, à l’Association internationale des éducateurs de jeunes inadaptés (A.I.E.J.I.) qui compte aujjourd’hui dix-huit branches nationales, réparties sur cinq continents. Il sera président de l’association de novembre 1955 à avril 1978. Il obtiendra pour l’A.I.E.J.I. le statut consultatif auprès de l’UNESCO et des Nations Unies. Il sera lui-même, à plusieurs reprises, chargé de mission pour ces deux organismes.
À partir de 1962, il suscite une «table ronde» annuelle des organisations internationales intéressées à l’enfance et à l’adolescence. En 1971, cette table ronde s’institue en « Conseil des organisations Internationales directement intéressées à l’enfance et l’adolescence (C.O.I.D.I.E.A.) qui se réunit chaque année.
L’ampleur de cette action ne lui fera pas négliger sa Bretagne natale. Il sera membre fidèle de la Fédération bretonne pour la sauvegarde de l’enfance et de l’adolescence., et celle-ci étant devenu en 1965 le Centre régional pour l’enfance et l’adolescence inadaptées en Bretagne, il acceptera, malgré ses charges et sa santé, d’en être le président de 1967 à 1977. Depuis cette date, son état de santé s’était progressivement aggravé. Il meurt le 27 avril 1983 à Saint-Malo.
Quelques-unes de ses publications
- 1943 : La délinquance juvénile en Bretagne – centre régional d’éducation sanitaire
- 1945 : Ker Goat, le salut des enfants perdus – éditeur : Éditions familiales de France
- 1946 : L’enfance dite coupable – éditeur : Bloud et Gay, collection Réalités du travail social
- 1951 : Le scoutisme dans l’éducation et la rééducation des jeunes – éditeur : Presses Universitaires de France
- 1953 : La pierre au cou – éditeur : L’amitié par le livre
- 1953 : Les métiers de l’éducation difficile -(en collaboration avec le juge Jean Chazal et de Dr Andrée Dauphin) – éditions Lamarre (Guides Néret)
- 1957 : Mauvais garçons de bonnes familles : causes, effets, remèdes de l’inadaptation des jeunes à la société – éditeur : Aubier Montaigne
- 1960 : Jeunesse en danger – éditeur : Fayard, collection Les idées et la vie
- (en collaboration) Dictionnaire d’éducation familiale – éditeur : Privat, collection Époque
(Ouvrages disponibles – résultat d’une recherche sur Internet avec l’aide de la mémoire personnelle de Michel Delmas)