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1913 : Un « journal scout »paraît à Reims

 

Une définition intéressante

« Le Scout » de Juin propose, sous la signature de Jean Legendre, un article de conseils sous forme de lettre à un jeune « chef ». Il met en évidence, à la fois, le lien du scoutisme avec l’armée et leurs différences. À noter que celles-ci sont plus affirmées que décrites…

« J’ai 23 ans, m’écrivez-vous, je sors du régiment où mes galons de sous-officier sont la meilleure preuve que je n’ai pas perdu mon temps dans la paresse et l’oisiveté ». Je vous en félicite et j’en suis heureux d’avance pour vos futurs Éclaireurs. (…) Vous allez réunir des jeunes Français, leur parler, les guider dans l’accomplissement de leurs devoirs d’Éclaireurs. Eh bien ! mon cher ami, à mes yeux se pose une question et une seule : en avez-vous l’âme ?

« Mais, écrivez-vous, je ne comprends pas votre question : j’ai, pendant plus de six mois, eu 40 hommes à commander et je m’en suis très bien tiré. Je connais des personnes qui ont fondé des sociétés diverses et ont su leur faire remporter mille succès » Eh bien ! je suis enchanté de votre réponse, elle place justement la question sur le terrain où je voulais l’amener. Au régiment, vous aviez affaire à des hommes ; on vous obéissait parce qu’on ne peut concevoir le soldat sans obéissance et qu’au besoin quelques jours à l’ombre sont là pour rappeler ce principe aux étourdis. Dans les sociétés de gymnastique et autres que vous me citez, le but est atteint dès que les exercices d’ensemble sont réussis et que la vigueur physique des membres est développée et accrue.

Or, en matière de scoutisme, il ne saurait en être ainsi. Vous en serez guère jugé par les succès de votre troupe dans les manœuvres qui ne se verront pas (…) Au contraire, si on rencontre vos Éclaireurs se tenant mal dans la rue, traînant le soir, mauvais ouvriers, insupportables dans leur famille, on criera très haut que vous avez fait faillite et tous les diplômes et médailles de votre troupe ne sauveront pas la situation. On aura raison : au fond du scoutisme, il y a tellement de préoccupations morales qu’on ne peut en vain en faire abstraction.(…)

Vous avez lu nos publications, nous connaissez l’esprit de nos Statuts, vous savez combien nous voudrions que cette école des Éclaireurs soit avant tout une école d’abnégation et de dévouement !

Voilà en quoi, mon cher Ami, vous aurez à être le chef, voilà les responsabilités nouvelles qui, du jour au lendemain, vont peser sur vos épaules. »

Suit un paragraphe expliquant que le chef doit être, par son comportement personnel dans la vie quotidienne, un « exemple moral » avec une conclusion : « Pouvez-vous réellement être l’exemple ? Pouvez-vous être le chef qu’on suit ? ».

Un accent particulier est mis ensuite sur l’importance de l’amitié :

« Ce n’est point tout encore. Il existe une autre qualité qu’on n’exige généralement pas d’un moniteur et que l’on défend quelquefois même aux gradés : c’est l’amitié ».

Et elle est évoquée en conclusion, en même temps que la Patrie :

« Soyons donc des chefs dans toute la force du terme et nous pourrons tout obtenir de nos Éclaireurs : « Pour la Patrie et par l’Amitié ».