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1950 : Premier contact avec le scoutisme d’extension en hôpital psychiatrique

 Le scoutisme d’extension, présenté par ailleurs, s’est traduit dans plusieurs régions par un certain nombre d’expériences quelquefois originales.

 


Témoignage d’Yvon Bastide :

« Dans cette période, la notion de « Routier de service » est très répandue, et, dès qu’on semble disponible pendant quelques semaines de vacances d’été, il faut s’attendre à être appelé en renfort quelque part… C’est ainsi que je me retrouve, en 1949, requis pour aller « diriger » un camp de louveteaux de Béziers (ce qui est mon tout premier contact avec la branche) et, l’année suivante, envoyé à Saint-Alban sur Limagnole pour aider deux instituteurs à faire du scoutisme avec les garçons de l’institut médico-pédagogique annexe de l’hôpital psychiatrique.

Ces deux enseignants ont suivi un « stage d’information sur le scoutisme d’extension » alors organisé par Érable Lévy-Danon, dont le principe avait retenu l’attention des responsables de l’hôpital, alors en pointe dans le secteur de la psychiatrie « institutionnelle ». Pour ceux que ce sujet intéresse, je reprends ci-après quelques éléments concernant cet établissement et ses animateurs.

Je suis donc parachuté, pendant les congés scolaires de Pâques 1950,  en Haute-Lozère : à Montpellier il fait déjà presque chaud, mais à Saint-Chély d’Apcher (où nous pose un train poussif et où vient nous chercher la 15 CV du directeur), et à Saint-Alban, il y a encore de la neige. Je suis accompagné d’Antoine Sassine, étudiant en première année de médecine (plus exactement, en P.C.B.) qui, à ce titre, devrait en savoir un peu plus que moi sur ces garçons accueillis en hôpital psychiatrique… Le premier contact est sympathique, les instituteurs comme les garçons sont très ouverts à ce que nous allons leur apporter ; nous visitons l’institut, dénommé « le Villaret », situé à un petit kilomètre de l’hôpital. Dans les sous-sols, les cellules où, au siècle précédent, étaient enfermés les moins dociles par les « bonnes sœurs » en charge de l’établissement. Mais les conditions ont changé…

Les garçons sont habitués à des activités collectives non scolaires, ils animent une « coopérative » qui, entre autres activités, élève et vend des lapins. Nous les faisons jouer et chanter (les garçons, pas les lapins), il n’a pas de difficulté particulière. Nous organisons également des vraies sorties, c’est-à-dire des visites, par exemple à Nîmes avec visite à l’aéro-club :

Et une grande décision est prise pour l’été suivant : partir en camp ! Ce n’est pas évident au plan administratif, mais toutes les autorisations préfectorales sont obtenues et, sur la suggestion du Commissaire de Province, lui-même médecin (et futur Professeur de Médecine) nous choisissons le Camp André Portes, à Palavas les Flots, sur la plage…. Aucun de nous n’est diplômé pour un éventuel sauvetage alors qu’il est évident qu’une bonne partie de la journée se passera dans l’eau, heureusement peu profonde. Les garçons sont accompagnés de deux infirmières détachées du Villaret qui feront, comme eux, la découverte de la mer.

Le camp se passe bien ; je suis, pour l’encadrement, aidé de deux responsables EDF de Montpellier, Henri et Marion Aldémar, qui n’en savent pas plus que moi sur les handicapés mentaux. Dont nous découvrons certains aspects : quelques garçons sont très sensibles et, sous l’effet d’une émotion, même mineure – par exemple si on leur touche l’épaule – peuvent déclencher une « absence », c’est-à-dire perdre tout contact avec la réalité pendant un temps qui nous semble long. Nous devons noter la fréquence et la longueur des absences, qui peuvent arriver à n’importe quel moment, sur terre ou dans l’eau… Un autre est sujet à des crises d’épilepsie – que les autres qualifient de « petites » mais qui nous préoccupent ; les garçons ont l’habitude, ils s’installent en rond autour du malade et attendent que ça passe : « tu vas voir, il va pisser, ce sera fini ! ». Anecdote : nous recevons un jour la visite du curé du village. C’est le moment que choisit un des garçons pour faire la chasse à un papillon en utilisant comme filet son slip de bain…

Les activités se sont prolongées quelques années après mon départ de Montpellier, sous la responsabilité d’Antoine Sassine (devenu le célèbre Docteur A. Sassine) et de Théo Robert, l’instituteur du Villaret qui a pris goût à nos activités. Il obtiendra l’achat par le Mouvement d’un lieu de sorties proche du village, le moulin du Franquet, qui est toujours la propriété de la région et est devenu un lieu de camps et de stages.

Les éclés au Franquet en 1951 :