Rechercher

1954 : Contribution à l’éducation populaire en Afrique

 

… en particulier grâce à l’EROM, Équipe de relations avec l’Outre-Mer.

 

La contribution du Mouvement au développement de l’éducation populaire se traduit souvent par des activités de « prolongement », qui ne se présentent pas obligatoirement sous la forme classique d’activités de scoutisme au sens premier du mot.  En ce qui concerne l’Afrique « noire », l’EROM a mené, dans les années 50 et 60, en coopération étroite avec les associations nées des E.D.F. mais également avec les CEMEA et les F.F.C., une action continue qui mérite d’être connue. Nous reprenons ci-après les éléments présentés annuellement à ce sujet dans les rubriques « l’après-guerre » et « le nouveau Mouvement » pour une vue plus synthétique de leur ensemble.

 

 

Présentation :


Bernard DUMONT a mis à notre disposition ses archives de l’EROM de 1954 à 1968.


Elle s’articulent en :

– des échanges de correspondance concernant essentiellement la préparation des caravanes ou des stages de formation des animateurs, en France ou localement,

– des convocations et des comptes rendus de réunions de préparation, au plan national France ou au plan régional  (Paris) mais également pour chaque pays concerné (Algérie, Côte d’Ivoire, Guinée, Fouta-Djalon, Madagascar, Mali, Niger, Sénégal, Soudan…)

– des bulletins d’information spécifiques EROM, numéros spéciaux des B.I. des E.D.F.,

– des programmes et des comptes rendus de caravanes,

– des listes de participants et d’animateurs,

– des rapports par groupes de travail : colonies de vacances, économie, éducation populaire, enfance inadaptée, enseignement, montagne,

– des programmes de conférences sur les problèmes africains,

– des annuaires locaux,

– et aussi un « carnet de stagiaire » de 1960, rendant compte d’un stage animé par Henri Laborde et Maurice Rouchy (donc dans un cadre CEMEA ?)


À l’origine, il est question de « Équipe Route Outre-Mer » mais cette dénomination devient rapidement « Équipe de Relations avec l’Outre-Mer » – mêmes initiales. L’ensemble des activités met en évidence une coopération continue avec les CEMEA et les associations nationales de scoutisme. Au cours des dernières années, apparaît l’existence d’un « Camp Africain de Formation » installé à …..  qui semble être un prolongement de l’action de l’EROM au service des entités africaines.


Le « dépouillement » de ces documents, effectué par une petite équipe réunie dans les Cévennes début septembre, a permis de proposer ci-après, année par année, un résumé de l’ensemble de ces actions. Merci à Claude et Michel Francès et à Mireille Sarran, membres de notre association et de l’A.A.E.E.,  qui ont mené à bien cette tâche, et à Bernard Dumont qui a rédigé le texte présenté en page suivante.



Bernard DUMONT : EROM et COFRAL

Mise au point sur l’historique, les aspects institutionnels et les rôles respectifs


Au sein  des EDF de 1950, la responsabilité des relations avec l’Outre-Mer était assurée par Pierre Kergomard et consistaient surtout en rencontres de responsables de hauts niveaux.


En 1951, à mon retour d’un stage professionnel de 9 mois au Cameroun où j’avais eu, grâce à Pierre Kergomard, des relations avec les Éclaireurs de Douala, j’ai cherché à renforcer les liens entre des Éclaireurs « de base » de France et des Territoires d’Outre mer.


Cela a abouti en Juillet 1953 à une première « caravane » qui ne comptait que deux participants (Jacqueline Dumeste et moi), suite à la défection, en dernière minute, des 7 ou 8 autres inscrits (EDF, SDF, Ajistes). Elle a été reçue au Sénégal par « Albert » Abdoulaye Ndiaye, Commissaire Régional des EDF d’Afrique Occidentale qui avait participé au Jamboree de Moisson. Elle a pu être considérée comme une expérience positive de « faisabilité », permettant de lancer des initiatives plus ambitieuses.


Pendant mon année de service militaire (novembre 1953 à octobre 1954), c’est Jacqueline DUMESTE, alors professeur à Poitiers, qui a préparé la seconde caravane. Comptant 7 participants sous la responsabilité de Jacqueline Dumeste elle a, en juillet et Août 1954, pu commencer à réaliser quelque chantier au Sénégal avec les EDF locaux (en cours de transformation en Eclaireurs d’Afrique, les EDF et la Région AOF ayant convenu de réaliser l’indépendance des Éclaireurs d’Outre-mer).

Il existe un compte-rendu fabriqué artisanalement et illustré de cette caravane.

C’est de cette époque que date le sigle « EROM », Équipe des Relations avec l’Outre-Mer.


Les EDF m’ont recruté pour 6 mois à mi-temps (1er semestre 1955) afin de préparer la poursuite et l’extension des caravanes : diversification des organismes participants et des chantiers (ou groupes de travail), information et mobilisation des participants longtemps avant le départ, multiplication des pays, tentatives de réciprocité (les Africains de base devant eux aussi pouvoir visiter leur « outre-mer »).


Après mon affectation administrative professionnelle en Afrique occidentale (novembre 1955, Sénégal puis Soudan), c’est Charles Boganski, recruté par les EDF, qui a été jusqu’aux années 70, l’organisateur et l’animateur de toutes les caravanes EROM ainsi que du COFRAL, Centre de formation, installé au Dahomey, des responsables Éclaireurs d’Afrique et de Madagascar qui avait été créé pour appuyer les associations africaines de scoutisme laïque dans la formation de leurs responsables.


Pendant mes séjours professionnels au Sénégal et au Soudan, j’ai toujours eu, à titre bénévole et en dehors de toute responsabilité professionnelle, des relations étroites avec les organisations laïques de jeunesse et d’Éducation Populaire et ai pu collaborer à leurs activités. Au Soudan-Mali, particulièrement, il a été possible de mobiliser assez de jeunes volontaires pour pouvoir y accueillir, plusieurs années de suite (1958 à 1962) quelque cinq ou six caravanes distinctes, sur la douzaine qui existaient dans plusieurs pays d’Afrique (Sénégal, Guinée, Haute-Volta, Côte d’Ivoire, Dahomey, Niger, Algérie…) et de réaliser plusieurs caravanes d’Africains en France.



NB :


– Au Soudan (devenu République soudanaise en 1958 puis République du Mali en1960), j’étais Directeur de Cabinet du Ministre du Travail, des Affaires Sociales, de la Jeunesse et des Sports, de mai 1957 à juillet 1958, puis conseiller technique du Ministre du Travail de janvier 1959 à juillet 1961 et n’avais plus aucune responsabilité institutionnelle aux EDF. Mais les amis de la Chaussée d’Antin me faisaient parvenir les documents intéressants, en particulier les compte-rendu des caravanes dont vous disposez actuellement, ainsi que les informations sur le COFRAL.


Mes activités avec les organismes de jeunesse et d’Éducation populaire étaient privées et bénévoles, mais, bien entendu, facilitées par mes relations professionnelles.


– Plusieurs pays ont changé de nom en devenant indépendants en 1960 : outre le Soudan devenu Mali, le Dahomey est devenu Bénin et, plus tard, la Haute Volta est devenue Burkina Faso. Le Fouta Djalon est la région montagneuse de la Guinée (capitale Konakry, ne pas confondre avec la Guinée ex-portugaise capitale Bissau et la Guinée Équatoriale,  ex-espagnole capitale Malabo).


– C’est Charles Boganski qui assurait, en ce qui concerne les Caravanes, l’essentiel du travail opérationnel d’organisation et de relations,  désignait le responsable de chaque caravane contrôlait la préparation des budgets et obtenait les comptes-rendus…


Il avait par ailleurs l’entière responsabilité de la vie et de l’activité du COFRAL


-> voir  dans la rubrique « l’après-guerre » : 1954 – 1956 : les débuts de l’EROM, équipe des relations avec l’Outre-Mer émanation de la branche aînée en coopération avec les CEMEA en Afrique



L’année 1958 marque une forte implication du Mouvement dans les activités de relations avec l’Afrique, avec une réelle volonté d’adaptation à l’évolution « politique ».


D’une part, une partie importante de la revue Routes Nouvelles est consacrée à ces activités. Mais la circulaire de convocation des participants aux caravanes insiste sur la nécessité, « au moment où une modification des structures politiques et administratives des territoires d’Outre-Mer est à l’étude », de prendre connaissance d’un certain nombre de documents présentant :

– un extrait du préambule de la Constitution de 1946,

– la « loi cadre » de 1956 sur l’Union Française et ses décrets d’application.


Il est également conseillé de lire un certain nombre d‘ouvrages ou de voir quelques films  sur le sujet : il est clair que l’objectif des caravanes ne se limite pas à leur partie touristique !


En fin d’année, un texte très complet est publié sur « Les Éclaireurs de France et  les échanges avec l’Outre-Mer » qui fait le point, à la fois sur les relations avec les associations locales ou nationales et l’organisation des caravanes. L’une d’elles accueille en France un groupe de jeunes Africains appartenant aux Éclaireurs d’Afrique.

 

-> voir  dans la rubrique « l’après-guerre » : 1958 : les relations avec l’Outre-Mer évoluent, … l’EROM aussi.

 


En 1959, le « projet E.D.F. – E.D.A. » prévoit, à la fois, des camps-écoles communs et l’organisation de caravanes. En ce qui concerne les caravanes, on voit apparaître, d’une manière formalisée, des « centres d’intérêt » animés par une équipe de volontaires. Au cours de l’année, l’antenne « Soudan » se transforme en association à part entière… et l’antenne parisienne organise des conférences sur divers sujets concernant l’Afrique, sur des thèmes très variés, culturels ou politiques.

 

-> voir  dans la rubrique « l’après-guerre » : 1959 : l’EROM poursuit son implantation … en liaison étroite avec les CEMEA et l’enseignement en Afrique

 


En 1960, les activités de l’EROM continuent, comme en atteste le volumineux courrier échangé pour la préparation et le suivi des caravanes et des séjours. Les E.D.F. agissent, en métropole, en relation avec les CEMEA et la Ligue de l’Enseignement et, sur place, avec les Éclaireurs d’Afrique et la Fédération du Mali.


Le rapport final rappelle les objectifs de l’équipe et les méthodes de travail proposées. Le dépouillement de 80 fiches d’inscription de 1960 semble intéressant :

– les âges : 75 % se situent entre 21 et 27 ans, la majorité autour de 24 ans ; quelques « anciens », en général animateurs, et quelques « petits jeunes » entre 17 et 20 ans ;

– les sexes : les filles sont majoritaires à près de 60 % ;

– les activités : près de la moitié (44%) sont enseignants ou préparent une carrière de professeurs. À noter un petit groupe d’élèves de l’ENSET ou d’élèves professeurs d’éducation physique ;

– les engagements : à côté de 35 EDF, forte présence des F.F.C. ou des CEMEA et quelques ajistes (surtout membres de la FUAJ). Quelques membres d’autres associations de scoutisme (E.I., S.D.F., E.U.) ou proches (Cœurs Vaillants, Âmes Vaillantes, JEC), plusieurs syndicalises étudiants, et deux Amis de la Nature. À noter qu’un tiers n’indique aucun engagement dans une association ou un Mouvement.


Quelques lettres traduisent une certaine inquiétude, compte tenu de l’évolution constatée, mais le « discours » prononcé par le représentant de l’EROM à l’occasion de l’assemblée fédérale des Éclaireurs d’Afrique, complété par une « lettre à un ami », semble prouver que l’ensemble est sur le bon chemin.


Les activités, comme prévu les années précédentes, sont organisées lorsque c’est possible autour de thèmes dont certains sont nouveaux : les rapports correspondants évoquent successivement les stages « éducation populaire », « archéologie » devenu « zoologie »,  « enfance inadaptée ».

Dans certains cas, des difficultés, quelquefois de dernière heure, apparaissent et nécessitent des adaptations : c’est ainsi que le séjour prévu à Bambilor au Sénégal ne peut avoir lieu car « les E.D.A. et CEMEA en opposition ou mésentente avec le gouvernement sénégalais ne travailleront pas avec nous » ; de retour à Bamako, le groupe rejoint à Sotuba un « centre de rééducation sommaire pour jeunes délinquants mineurs » puis à Nienebale un centre agricole « recevant des jeunes sans travail pour en faire des cultivateurs qualifiés ».

Et les événements « politiques » interviennent également, en particulier lors de la rupture des relations entre le Sénégal et le Soudan en août, entraînant quelques problèmes pour le rapatriement des membres du groupe.


Plusieurs documents nous ont semblé intéressants :

– quelques extraits du rapport final,

– une circulaire de la Fédération du Mali, République Soudanaise, rend compte d’une réunion organisée le 5 mars « dans le bureau du Président du Gouvernement de la République Soudanaise » en présence de plusieurs responsables (donc à un haut niveau), concrétise la collaboration entre nos Mouvements et l’État Soudanais,

– une fiche présente les stages pris en charge par les E.D.F. à côté des autres organisations, CEMEA, F.F.C. et Ligue de l’Enseignement, dans le cadre d’un programme de formation de cadres, dans les États d’Afrique Noire et de Madagascar et en France,

– les pages du rapport racontant… les péripéties du rapatriement fin août,

– et la lettre écrite à Charles Boganski le 21 août par le responsable de la caravane concluant quand même… « le moral des troupes est bon ».



En 1961, un avant-projet évoque une centaine de participants répartis en dix groupes pour des séjours de six et huit semaines, essentiellement sur le thème « éducation populaire » qui, définis pour l’EROM par un « cahier Routes » de culture générale, se veut centrée sur l’initiative locale. Six sont prévus au Soudan, un en Haute-Volta, deux en Côte d’Ivoire, un en Guinée.


La réalisation va être un peu différente, si on en juge par les rapports correspondants :


– le groupe « I/II » considère que « tout a été parfait d’autant plus que les conditions africaines ne permettent pas d’établir un horaire ». Pendant le trajet en bateau, une série d’exposés aborde la géographie et l’histoire de l’Afrique, son économie, la politique – avec des débats enflammés de la part des Africains, la famille africaine, l’art africain. Un complément sera apporté au retour sur l’Islam en Afrique.


Une première partie de la caravane va de Dakar à Nienebale où un séjour est organisé dans le centre « rural éducatif » qui a pour but de « ramener à la vie agricole de jeunes inadaptés ».  Au retour à Bamako, sont évoquées des « réunions politiques et sociales » sur les problèmes de l’Afrique, en présence du Haut Commissaire à la Jeunesse.


– le groupe III rejoint à Orodara en Haute-Volta un centre de même objectif pour un programme de travail établi par le Directeur des Affaires Sociales de HauteVolta. Mais… « nous apprenons que ces 25 ha qui constituaient jusqu’alors l’essentiel de notre travail ne sont pas encore acquis et que propriétaire et acquéreur n’en sont encore qu’au stade de palabres ». Le groupe rejoint donc un petit village de brousse, Nahon, pour « pratiquer des activités de colonie de vacances ». Pendant que les garçons assurent l’encadrement des enfants, les filles se chargent des soins médicaux, de la mise en place d’une pharmacie, de la formation d’un élève « à même d’assurer les soins courants »… et d’un atelier de couture.


Le séjour – qui est, pour l’EROM, le premier en Haute-Volta – se prolonge à Ouagadougou.


– le groupe IV est accueilli à Abijan par le Commissaire Général des Éclaireurs de Côte d’Ivoire pour un séjour à Yassap où les activités sont variées : la présence dans le groupe d’un maçon professionnel permet de participer à la construction d’une école ; une permanence est assurée au dispensaire installé dans une salle de classe ; des séances de lecture et de calcul sont organisées pour la scolarisation des adultes ; des activités récréatives sont également proposées, avec, à Debrimou, une « soirée Éclaireurs ». Ce séjour est suivi, du 5 au 18 août, d’enquêtes, visites et balades à Dabou, Tiassale, Yamoussoukro,Bouake, Bobo Dioulasso…


La conclusion du rapport, qui évoque une « réussite partielle », propose un nouveau projet pour l’année suivante, mais également la création d’un camp-école préparatoire pour les cadres des unités Éclaireurs et d’un stage d’éducation populaire « deuxième degré » dans le cadre d’un village ou d’un quartier pour « faire des expériences vivantes ».

 

-> voir  dans la rubrique « l’après-guerre » : 1960 – 1961 : Outre-mer, ça se complique … mais le moral reste bon !


 

L’année 1962 et les suivantes marquent une très forte évolution vers une action « pédagogique » concernant les problèmes rencontrés par les pays d’Afrique nouvellement indépendants et, plus spécifiquement, leur  jeunesse. À côté des documents habituels de préparation et de réalisation des caravanes, les archives présentent donc un grand nombre documents et de comptes rendus :

– un texte intitulé « La jeunesse d’Afrique face à ses problèmes » décrit la situation et inventorie les diverses solutions possibles, dont certaines déjà expérimentées (chantiers, services civiques) ; il apparaît que ce texte a été, sinon rédigé dans sa totalité, du moins revu par Bernard Dumont…

– une présentation de ces problèmes à Paris ou au relais culturel de la Hacquinière,

– la participation aux Journées d’étude organisées par la Ligue Internationale de l’Enseignement, de l’Éducation et de la Culture Populaire à l’occasion de la création du Centre Africain d’Éducation Populaire de Yaoundé (Cameroun) en décembre. Le projet de programme démontre, une nouvelle fois, l’implication de Bernard Dumont qui en (re)définit « l’orientation pédagogique ».


Ces journées d’étude aboutissent à la définition très précise des actions à mener sur place, et même d’un « programme-type d’un stage d’éducation populaire dans les pays en voie de développement ».


Dans ces conditions, il est utile de rappeler les objectifs et les modes de fonctionnement des caravanes en relation avec ces objectifs, d’où la rédaction d’un « règlement intérieur » qui les résume, en précisant bien que « Ces voyages, appelés “ caravanes ”,  n’ont rien de commun, tant dans leur conception que dans leurs applications,    avec un tourisme superficiel ou un déplacement destiné à afficher platoniquement de bons sentiments ». S’en suit également une note rappelant les liens entre l’EROM et le Mouvement, insistant sur la nécessité d’une meilleure information interne, mais également sur une plus grande implication des structures… Au passage, on note une allusion aux aléas de cette « cohabitation » : « L’expérience de dix années de fonctionnement montre que le risque n’est pas considérable de voir l’EROM se détacher du Mouvement, comme aurait pu le faire croire la divergence des recrutements, des méthodes et des structures ». L’EROM, activité de prolongement du scoutisme vers un domaine précis, n’a pas échappé à cette difficulté…


Le bulletin d’information de l’Équipe des Relations avec l’Outre-Mer de juin 1962 rend compte de cet ensemble de préoccupations, comme en atteste son sommaire. À noter un article du pasteur Roland de Pury, professeur à l’École de théologie protestante de Ndoungue au Cameroun, intitulé « La laïcité indispensable en Afrique »,  qu’il nous a semblé intéressant de présenter car il pose un vrai problème : « … Je me demande qui, mieux que nous, pourrait aider les Africains non pas à guérir, mais surtout à ne pas attraper cette maladie qui est la pire malédiction historique et qui a nom le cléricalisme, c’est-à-dire l’utilisation de la politique par l’Église et l’utilisation de l’Église en politique. » Ce texte affirme même que « la laïcité est le véritable fruit du christianisme pris au sérieux »… Ce même thème de la laïcité est repris dans le numéro de mai 1963 : « On imagine combien la laïcité bien comprise peut-être utile dans les pays d’Outre-mer ! Elle offre un terrain fraternel sur lequel bien des hommes, quelles que soient leurs origines, peuvent se rencontrer pour se libérer de leurs préjugés de caste. Elle constitue même le seul moyen de rassembler dans une même collectivité, qu’ils ‘agisse d’un groupe à l’échelle d’un mouvement de jeunesse ou d’un pays tout entier, des hommes aussi divers que ceux de l’Afrique par leurs ethnies, leurs croyances, leurs traditions et leurs opinions. La liberté politique va de pair avec la liberté spirituelle, et la laïcité est la seule possibilité réelle de coexistence de ce pluralisme. »

 

Le même bulletin d’information, devenu « Caravanes » en 1963 (avec abonnement spécifique car « la parution sera désormais régulière, nous vous le promettons »), présente les conférences d’information, réalisées ou prévues, à Paris et en province (Mirecourt, Saint-Amand, Bourges, Charentonnay et dans les foyers ruraux de la région de Bourges). Les sujets sont très variables et abordent des aspects très différents :

–   polygamie et évolution sociale,

–   les travailleurs Africains en France,

–   l’animation rurale,

–   la musique africaine,

–   l’effort d’éducation et de développement de l’Algérie,

–   l’économie marocaine,

–   une expérience à Madagascar : l’école rurale,

–   Afrique : la démocratie est-elle possible ?

–   la jeunesse dans la Guinée de 1964,

–   la condition féminine en Afrique…

 

Au passage, notons une activité « culturelle » « pour clôturer agréablement le cycle d’information de l’année 1962-1963 » avec un récital de poésies et de musiques de l’Afrique.

 

En 1963, une note décrivant « l’orientation nouvelle du centre Africain d’Éducation Populaire » fait plusieurs allusions aux « expériences tentées par les quatre Mouvements éducatifs français – Ligue Française de l’Enseignement, Éclaireurs de France, CEMEA, Francs et franches camarades – qui seront étroitement associés au fonctionnement du Centre ». Parmi les « expériences » citées, « le caravane de jeunes Africains et Français effectuant dans une région un chantier ou une mission d’éducation populaire en milieu rural (expérience faite par les Éclaireurs de France dans plusieurs pays d’Afrique occidentale).

 

En février, un « Conseil national » du Scoutisme Français fait le point sur « le scoutisme dans les anciens territoires d’Outre-mer », avec un inventaire des associations « apparentées » aux associations françaises. Il apparaît que certains pays sont « favorables à la pluralité des Mouvements de jeunesse », d’autres sont tentés par une organisation unique. Un problème évoqué est celui des demandes d’affiliation au Scoutisme Mondial. Une conférence du Bureau International avec, pour les E.D.F., la participation de Dominique François, Charles Boganski et Bernard Dumont, est prévue à Genève en mars pour étudier les problèmes de développement du scoutisme en Afrique.

 

-> voir  dans la rubrique « l’après-guerre » : 1962 – 1963 : pour les activités Outre-Mer, priorité à la pédagogie … sur la situation et les problèmes des pays africains nouvellement indépendants, surtout en ce qui concerne la jeunesse