Rechercher

1986 : Bernard Lefèvre : louveteau à Caen, responsable national Formation et pédagogie

 

 

Quatrième enfant d’une famille « Éclaireuses Éclaireurs », j’ai commencé louveteau aux EEDF en 1965. Par la suite j’ai été éclaireur, ainé, responsable. J’ai participé au rassemblement de Cantobre en 1971, aux assisses d’Avignon en 1974. Responsable au groupe de Caen j’ai travaillé avec le service Vacances pour Handicapés, avant ensuite d’être embauché comme permanent dans la région Basse Normandie en avril 1980. Membre du comité de rédaction de Routes Nouvelles, participant de Bécours 81, j’ai contribué aux travaux pédagogiques de l’après Bécours et au secteur Expression Création.

Dans les suites du congrès de Macon (1985) Francois DAUBIN, nouveau Délégué général, m’a proposé de rejoindre la nouvelle équipe nationale. J’ai été responsable national Formation de septembre 1986 à septembre 1994, Responsable national Branche Éclaireuses Éclaireurs de septembre 1986 à 1991, Coordinateur Pédagogique de 1991 à 1994, responsable du Jeu Navigator en 1988-89. J’ai contribué à la réalisation d’un vaste chantier pédagogique que je vais tenter de restituer ici.

Dans la suite de Top76 et de la promotion des initiatives, Bécours 1981 met en avant le « vivre ensemble » et les secteurs activités (scientifiques, expression-création…).

Sitôt après commence un travail d’écriture des propositions pédagogiques.

Il s’agit de formuler ce qui fait (ou doit faire) socle ou cadre commun.

C’est ainsi que six numéros des Cahiers du Responsable – Collection Animation sont édités entre 1982 et 1985 (Propositions pour la branche Éclaireuses Éclaireurs 1983, Propositions pour la branche Louveteaux 1983, Groupes Communautaires 1983, Propositions pour la branche Lutins 1984, Activités ouvertes 1985 et L’aventure EEDF 1984) et un Routes Nouvelles Spécial Ainés 1982.

Dans la foulée est conçu un premier outil : le carnet d’aventure (mai 1986) et par la suite un carnet de 100 fiches pour l’Aventure. Il s’agit de proposer un outil aux jeunes qui leur permet de garder trace de leur parcours, de leurs engagements et responsabilités, de ce qu’ils ont appris… L’outil est très ouvert avec beaucoup de pages blanches à personnaliser. Ces pages blanches permettent à chacun de construire son carnet. Cela peut être, par exemple, en collant une des 100 fiches proposées dans un carnet en complément.

A partir de septembre 1986 et de la mise en place d’une nouvelle équipe nationale, le travail sur les propositions pédagogiques et les outils à disposition va se poursuivre sur plusieurs années. Ce travail mobilise un nombre croissant de militantes et militants de l’association.

Les objectifs :

– remettre du sens

– admettre des manières différentes de faire mais dans un même esprit

– rénover les pratiques de ceux qui font et outiller ceux qui ne font pas

– faciliter l’intervention des jeunes responsables

– répondre aux besoins et désirs des jeunes qui ne viennent au scoutisme que pour une courte durée – reconstruire un parcours militant plus complet

– mettre en avant l’apprentissage, l’exercice de la responsabilité et la pédagogie du projet.

En 1990 est affirmée la volonté de disposer des outils simples pour les groupes qui démarrent ; ce n’est pas toujours évident.

Pendant toutes ces années, il est primordial pour l’équipe nationale d’être sur le terrain avec les acteurs bénévoles (visites de groupe et de camp, week-end et stages régionaux, étés complets à Bécours…).

Il s’agit de promouvoir un scoutisme proche des réalités que rencontrent les responsables.

Le chantier pédagogique se concrétise de 1986 à 1994 autour de plusieurs axes :

 

1) Les publications :

Au début des années 1990, les documents pédagogiques de référence sont revus, précisés et réédités dans la Collection Pédagogique : L’Aventure Lutins en 1993, l’Aventure louveteaux en 1994, l’Aventure Eclés en 1994, l’Aventure Ainés en 1992 et l’Aventure vacances en 1992.

C’est le travail des équipes pédagogiques réunissant des militantes et militants de toute la France.

Des articles dans les revues (L’Equipée, Loustic, Routes Nouvelles) accompagnent ce travail.

 

2) Les outils pédagogiques :

Plusieurs types d’engagement sont définis.

Le premier est individuel et par rapport aux valeurs de l’Association. La règle d’Or transcrit les valeurs et les principes de l’association en terme simples avec un vocabulaire adapté.

Pour les lutins c’est l’arbre aux cinq clés, pour les louveteaux Les chemins de l’aventure et pour les ainés la Charte du Clan).

Le second engagement concerne la Règle de vie. Évolutive, modulable et positive, la Règle de vie est justifiée par rapport à la Règle d’Or, élaborée et décidée en conseil. Elle est affichée sur le Livre de bord

Le troisième engagement se fait par la participation au projet.

Le quatrième engagement concerne la prise de responsabilité.

Tout au long de son itinéraire à travers les branches, il est proposé à chacun de s’engager à sa mesure. Chaque engagement prépare les suivants.

Il ne s’agit pas de supprimer la promesse ou la loi, mais, surtout là où elles ont disparu, de réactualiser et redynamiser ces pratiques pédagogiques piliers de la méthode scoute.

La progression, c’est l’acquisition de compétences pratiques et techniques, de développement de son autonomie personnelle et de ses capacités à prendre et assumer des responsabilités. Elle se fait dans la vie du groupe et est matérialisée dans des outils collectifs (Livre de bord, Arbre aux cinq clés) ou individuels (Carnet d’Aventure pour les Éclés, Traces d’étoiles pour les Louveteaux, l’agenda pour les Ainés.

Pour les Louveteaux une fiction est écrite pour offrir une alternative au Livre de la Jungle.

C’est Mission Jeito (1992), histoire imaginaire permettant de mieux faire vivre le cercle. Cette fiction est publiée en deux versions pour les enfants et pour les responsables.

Pour les Eclés, en mars 1990 parait, juste avant le premier Cap Eclés, le Carnet du CE.

Pour les responsables, le Carnet du Responsable est conçu par l’équipe formation. Dans une première version (janvier 1988) en 90 pages, puis une seconde en plus de 120 pages ce classeur en 3 volets et 3 coloris au choix a l’ambition de faciliter « l’élaboration du projet d’activité des cercles, des unités… ». Dans l’objectif d’aider chaque responsable de l’association à assumer ses fonctions, c’est un outil d’informations pratiques et techniques mais aussi un moyen de mesurer sa progression. En cela il constitue un outil de formation pour les équipes de stage. L’association, dans ce sens, décide de faire un effort de financement pour donner gratuitement le carnet à chaque stagiaire 1er degré.

 

3) Navigator, Les rassemblements :

 

  • Le jeu Navigator (1989) a pour objectifs de :

– Faire vivre concrètement par le jeu nos propositions pédagogiques

– Créer de nouveaux outils de progression

– Renforcer l’identité de l’Association et se mobiliser

– Mieux communiquer entre nous et à l’extérieur

– Mettre en avant la pédagogie du projet

D’octobre 1988 à septembre 1989 Navigator, Le jeu des Aventuriers de l’Espace, propose une course en 4 étapes et 2 escales avec des outils : livres de bord, fiction, réseau d’aide et de soutien (Navigassistance), minitel. Le jeu est géré par la guilde (dont Menta et Zorgloub) et les magiciens (référents régionaux de branche) dans chaque région.

La première escale (14 janvier 1989) consiste en l’envoi du Message aux Enfants du monde.

Celui-ci est rédigé suite à un colloque sur les Droits des Enfants au Sénat (14 et 15 mai 1988).

La deuxième escale les 6,7 et 8 mai 1989 réunit à la Courneuve (93) plus de 6 000 éclés pour

3 jours inoubliables. Au programme : des grands jeux dans Paris, la visite de la Cité des

Sciences et du Musée de l’Air du Bourget, une réunion de près de 400 CE, un cross de plus de

2 000 Eclés, des concerts, des spectacles et une soirée avec Yves Duteil. Celui-ci brandit le foulard blanc distribué à chaque participant.

L’organisation du rassemblement, entièrement assurée par les militants et les salariés de l’association, est l’occasion de poursuivre le vivre ensemble lancé 8 ans plus tôt à Bécours.

Le jeu a connu un réel engouement puisque dès la première étape 60 vaisseaux Lutins, 184 vaisseaux Louveteaux, 377 vaisseaux Eclés et 66 vaisseaux Ainés envoient leur inscription.

L’ensemble du mouvement est mobilisé, le sentiment d’appartenance est notablement développé et la confiance les uns envers les autres renforcée. Les EEDF montrent leur unité

« retrouvée(?) », leur capacité à se mobiliser et à organiser un grand rassemblement.

 

  • Le premier Cap Eclés réunit au centre EEDF de la Couturanderie (en Sologne), en novembre 1990, prés de 500 éclaireuses et éclaireurs et leurs responsables (Cap Respons). Il fait suite à la parution en mars 1990 du Carnet du CE. S’adressant d’abord aux coordinatrices-eurs d’équipage, à ceux se préparant à y être et à leur responsable, il est vite dépassé par son succès et accueille plus largement tous leséclés volontaires.

Centré sur la vie en équipage et les techniques de camp même dans des conditions difficiles, Cap Eclés continue l’esprit de la Courneuve en rassemblant la plupart des sensibilités.

Il a depuis lieu chaque année.

 

  • Le Bataclan rassemble chaque année les clans de toute la France dans une sympathique compétition. La région d’origine du clan ayant remporté le Bataclan organise le suivant.
  • Treec 93 (Trans Euro Eclés) rassemble en mai 1993, dans un camp avancé, ainés et responsables à Montpellier … Pendant tout l’été des projets internationaux se déroulent.
  • Les Aventures Solidaires de Mosaïque, ce sont, 4 rassemblements pendant l’été. 1996, un programme coloré d’éducation à la solidarité : projets bleus « Copains du monde », projets vert « Aime ta planète », projets rouges « Bien dans ton corps », projets jaunes « Au service du quartier, des voisins », projets orange « Tous différents tous égaux » et projets violets » Eclés solidaires ».

 

4) Les acteurs :

Afin de mener à bien tous ces chantiers, il est nécessaire de mobiliser le plus possible de bonnes volonté et de réussir à faire travailler ensemble des personnes qui en ont parfois perdu l’habitude.

Les équipes pédagogiques sont développées et la mise en place de référents régionaux de branche encouragée. De nombreux militants s’engagent dans les différents chantiers. Les débats sont parfois animés.

Les membres de l’équipe nationale chargés de responsabilité pédagogie voit leur nombre augmenter et des responsables nationaux de branches bénévoles sont nommés…

Les Journées Pédagogiques de janvier 1991 produisent un travail de synthèse « Propositions pour affiner notre pédagogie de branches progression et engagement ».

Il fait le point par rapport à chaque branche sur les types d’engagement, sur la progression individuelle et collective et les méthodes et outils.

5) Les camps d’application

Chaque été des camps nationaux d’application sont organisés (parfois à thème en liaison avec les secteurs d’activité).

L’équipe nationale s’investit particulièrement pendant l’été à Bécours en organisant directement des camps, en participant à l’EDAA (équipe d’accueil et d’animation), en encadrant des stages et organisant chaque année les Rencontres de Bécours.

Une tournée de visite de camp est mise en place d’abord pour suivre et accompagner les stagiaires 2ème degré pendant leur stage pratique, ensuite pour répondre à la demande de responsables régionaux.

6) La formation

Dés 1986 l’équipe formation se met au travail sur plusieurs chantiers :

– Le plan de formation des EEDF redéfini en 1980 est prolongé et précisé : 3 niveaux de formation (1er degré Responsable d’Animation, 2ème degré Responsable d’Unité, de Camp, de Séjour Vacances et 3ème degré Membre d’une équipe ou Responsable d’une structure d’activité) et deux formations de formateur (Formateur dans une équipe de stage et

Responsable de stage). Les formations sont conçues en alternance et validées par des certificats d’aptitude. Pour chaque niveau de formation sont définis des objectifs, un référentiel de capacité, un minimum d’acquisition garanti (en terme de contenus), et des outils d’auto-évaluation.

– Des affiches « vocabulaire » destinées à assurer un minimum de cohérence pédagogique sont éditées.

– Le Carnet du Responsable, et ses différents ajouts, est conçu et utilisé comme outil de formation.

– La formation 2ème degré, chainon essentiel de la formation des militantes et militants, est promue et développée sous la responsabilité nationale. A Bécours, à Chardonnay, entres autres, chaque année près d’une centaine de stagiaires, issus des groupes locaux ou des

Services Vacances, partagent une expérience capitale pour leur investissement scout.

Certains prendront de grandes responsabilités par la suite.

– Le livret et le contrat d’engagement sont mis en place. Ils sont destinés à contractualiser l’engagement de chacun dans une responsabilité, à en fixer les contours et les conditions d’accompagnement.

– Six numéros des Cahiers de la Formation sont publiés : n°1 juin 1991 L’accueil dans les stages, n°2 mars 1992 L’évaluation, n°3 novembre 1992 Plan de formation, n°4 octobre 1993

Être formateur, n°5 du côté de services vacances et n°6 juin 1994 Camp Camper (81 pages et

30 fiches pratiques). Ces cahiers à destination des cadres régionaux, des formateurs et des formateurs stagiaires offrent un espace pour la réflexion pédagogique et contribuent à l’amélioration des pratiques formatives.

– La formation 3ème degré à destination des équipes de groupe est organisée, souvent inter-régionalement, le plus souvent en week-end.

– Une campagne « Avec vous tout est possible… » est mise sur pied. Elle vise à développer les équipes adultes et à soutenir leurs actions en leur fournissant des outils adaptés. La formation 3ème degré, organisée souvent inter-régionalement, le plus souvent en week end,vient conforter le dispositif.

– Parallèlement l’équipe nationale construit et met en œuvre un plan de formation des permanents.

A l’énoncé des travaux réalisés pendant cette dizaine d’années, il est logique de se poser la question de l’évaluation de ces actions. S’il est difficile de déterminer si tous les objectifs ont été atteints et en quoi la réalité pédagogique EEDF s’en est trouvé positivement améliorée, il est certain que beaucoup des actrices et des acteurs de cette époque en ont retiré un bénéfice personnel en terme de progression, de formation et de développement militant.

Il est indéniable qu’au-delà de la conception et la construction des outils, la question pertinente est celle de la transmission et de la formation.