Compte-rendu et commentaires de Colette Charlet qui nous y a représentés
À l’occasion de la sortie de l’ouvrage « Les enfants cachés des Tilleuls de notre amie Domlinique Lardet…
« Résister, c’est exister », que reste t-il de l’histoire du village de Prélenfrey ?
En ce samedi 20 Juillet 2024, se déroulait au village de Prélenfrey une journée d’hommage, en mémoire de ceux et celles qui ont résisté, il y a maintenant plus de 80 ans, en accueillant des familles juives et leurs enfants afin d’échapper aux rafles des nazis. Tout un réseau de solidarité se construisit et on découvre que des jeunes de notre mouvement ont su prendre leur place. Grâce au livre de Dominique Lardet, « Les enfants cachés des Tilleuls – 1935-1946 », dont la famille trouva refuge à Prélenfrey, aux cahiers écrits par les enfants, retrouvés au cours du temps ; sont ressurgis les actes de Résistance de cette région du Vercors.
Voilà pourquoi en cette période politique si complexe, où l’on manipule les têtes, il est important de faire connaître ce qui s’est réellement passé. C’est ainsi que de nombreuses personnes , bien souvent des descendants de ces « héros » se sont rendu.es à Prélenfrey pour témoigner, laisser traces de ce dont les résistant.es construisirent, afin de faire vivre la liberté par la fraternité, la solidarité.
Les villages environnant la commune de Le Gua ont à cœur d’honorer la mémoire de ceux et celles qui ont laissé leur vie comme à Revolleyre. Ce qui est extraordinaire c’est que personne n’a opéré de dénonciation. On gardait en mémoire ceux qui partaient rejoindre les maquis.
Quelles traces de ce combat dans le village ?
En ce matin du 20 Juillet, sous la conduite de Dominique Lardet, nous avons parcouru le village, nous arrêtant symboliquement face aux lieux où ont été cachés les enfants. C’est un endroit où l’on vit de l’agriculture, du bois. Existait ce préventorium « Les Tilleuls », construit dès 1933, par le menuisier Lamorthe et qui accueillait des enfants prétuberculeux et qui a donc pu cacher enfants et familles. Grâce aux témoignages de ces enfants portés dans des cahiers, on a pu ensuite se rendre compte de ce qui s’est réellement passé.
Et voilà, qu’en 1944, les Allemands veulent fouiller les locaux. Heureusement Anne Wahl, infirmière, parle allemand, et leur fait comprendre qu’il y a des risques de contamination. Par peur, ils quittent ce lieu.
Devant chaque maison, hôtel, où des résistants ont agi, Dominique Lardet conte leur rôle, ce qu’ils et elles ont bravé.
Un temps d’hommage officiel au cœur du village
Cela se fit face aux plaques commémoratives, place des Justes et l’on déposa des gerbes. Sur les marches de la mairie, des élu.es de la communauté de communes de Le Gua prirent parole, ainsi que les descendants de la Résistance, des rescapés de la Shoah. Cela sera entrecoupé de chants comme celui de Bella Ciao, des Partisans, le chant des Tilleuls. Compte tenu de la situation, il est important de faire connaître cet engagement pour une société plus juste, non violente. Simon Farley, Maire de Le Gua nous le fit comprendre.
Un après-midi, dévoilant des initiatives et rôle de chacun chacune
Cela se fit de 15H à 18H. Mais avant cela, il y eut après l’apéritif, l’occasion d’avoir des échanges avec les participant.es. Voilà pourquoi, j’avais apporté des documents archives, photos de ma famille maternelle qui durent aussi se cacher, du rôle que les Eclaireuses et Eclaireurs de France (EEDF) ont joué, de mes échanges avec le scoutisme Polonais (ZHP)… Il se trouve aussi que ce sont des personnes qui ont joué un rôle dans la Résistance qui m’ont formée dans ce mouvement. Cela m’a permis de comprendre l’histoire de ma mère, juive native de Varsovie et qui avait fui l’antisémitisme vers la France, car les EEDF organisèrent en 1966, un voyage en Pologne, où les responsables Polonais des ZHP nous firent découvrir ce qui s’était passé réellement sur le terrain et dans les camps de concentration. Là aussi, il y eut comme dans le Vercors, des actes de solidarité. Oui, il s’agit d’une formation à la citoyenneté dans le champ de la culture de paix.
J’avais aussi apporté des livres du célèbre Dr Korczak, pédiatre juif polonais de Varsovie, exterminé avec les 192 orphelins de sa maison d’enfants, vers Treblinka, le 5 Août 1942. Celui-ci organisait aussi des camps de vacances, inspirés du scoutisme. Bien sûr, je mis aussi sur la table, « Mémoires du Convoi 6 », dont un de mes oncles fit partie, et j’y avais déposé mon témoignage concernant les actes de solidarité de mon père, pour sauver des membres de ma famille maternelle. Du coup, des personnes ont pris par photo des références des documents. L’une d’elle a découvert qu’un membre de sa famille avait fait patie du même convoi que mon oncle exterminé en Septembre 1942.
Qu’avons-nous appris au cours de ce tour de parole ?
Bien sûr, elle a été donnée en premier à Dominique Lardet, pour son livre.
Elle était accompagnée, d’Alex Dayet réalisateur, Ségolène Marbach des éditions PUG, d’Antoine Misy chargé de collections au Musée de la Résistance et de la Déportation en Isère, d’Andrée Barras Tixier, membre de l’Association de l’Histoire du Patrimoine, Bernard Reverdi -Prélenfrey dans la Résistance
Alors, quels thèmes ont été abordés ?
- Les enfants cachés en Isère Résistance et société dans les villages isolés L’implication des « Justes » dans la Résistance Comment assurer la transmission publique aux archives La transmission privée des familles
- Alors que s’est il passé avec les Juifs/polonais notamment ceux qui avaient fui le nazisme/long trajet vers Paris, puis vers le Sud/ligne de démarcation, fuir les Allemands. Mais en 1942, les choses vont changer dans la région alpine. Les Italiens ne peuvent plus agir et aider.
Va se poser la question des papiers d’identité. Les réfugiés vont arriver par milliers et en particulier avec les enfants. Même s’il y a des collectifs comme l’UJIF, l’OSE, les organisations clandestines, les mouvements des jeunes sionistes, alors, que faire ? Il y a aussi la filière marseillaise face à ce flux humain pour tenter de les mettre à l’abri.
On prend alors conscience que c’est dans les campagnes, zones de montagne que l’on peut plus ou moins agir. Dans ce village de Prélenfrey, les gens vivent en bonne harmonie et l’intendance paysanne joue un rôle (entraide solidarité) De plus dans ce village, on notait des familles nombreuses. Avec l’accélération des évènements, des faits de résistance ; il a fallu s’organiser par la coopération.
Alors, comment faire connaître et comprendre ce qui s’est opéré réellement, au travers des livres, qu’est ce qu’on fait de l’Histoire, quel est le rôle des musées, de leurs archives ?
En cette journée, il fut important de donner parole aux survivants. Cette histoire concerne tout le monde J’ai aussi découvert le rôle d’un mouvement comme le nôtre , pour apprendre à agir avec l’esprit éclaireur.
Et après…
Il serait important, que dans nos instances de formation en direction de nos responsables, des éducateurs, de ne pas oublier notre rôle, au cours de ces évènements historiques, car souvent elles ne sont pas abordées ou ignorées.
Ceux et celles qui ont vécu ces terribles évènements, ceux et celles qui ont agi à leurs côtés pour surmonter les difficultés, et ont ouvert des perspectives émancipatrices fondées sur des valeurs humanistes sont appelées à disparaître.
Qui va nous croire alors, tant on voit des mystifications au service d’intérêts malhonnêtes. Comme le chantait William Lemit : « Ensemble nous avons appris, bien mieux que dans un livre, qu’il faut aimer pour vivre… et on le chantait aussi dans nos veillées le chant des Tilleuls : Pourquoi, aujourd’hui rester seul ? L’été loin des villes t’appelle Ami si tu viens aux Tilleuls La vie, tu verras est si belle… (E.Lop)