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1962 – 1963 : pour les activités Outre-Mer, priorité à la pédagogie

 

… sur la situation et les problèmes des pays africains nouvellement indépendants, surtout en ce qui concerne la jeunesse.

 

L’année 1962 et les suivantes marquent une très forte évolution vers une action « pédagogique » concernant les problèmes rencontrés par les pays d’Afrique nouvellement indépendants et, plus spécifiquement, leur  jeunesse. À côté des documents habituels de préparation et de réalisation des caravanes, les archives présentent donc un grand nombre documents et de comptes rendus :

– un texte intitulé « La jeunesse d’Afrique face à ses problèmes » décrit la situation et inventorie les diverses solutions possibles, dont certaines déjà expérimentées (chantiers, services civiques) ; il apparaît que ce texte a été, sinon rédigé dans sa totalité, du moins revu par Bernard Dumont…

– une présentation de ces problèmes à Paris ou au relais culturel de la Hacquinière,

– la participation aux Journées d’étude organisées par la Ligue Internationale de l’Enseignement, de l’Éducation et de la Culture Populaire à l’occasion de la création du Centre Africain d’Éducation Populaire de Yaoundé (Cameroun) en décembre. Le projet de programme démontre, une nouvelle fois, l’implication de Bernard Dumont qui en (re)définit « l’orientation pédagogique ».


Ces journées d’étude aboutissent à la définition très précise des actions à mener sur place, et même d’un « programme-type d’un stage d’éducation populaire dans les pays en voie de développement ».


Dans ces conditions, il est utile de rappeler les objectifs et les modes de fonctionnement des caravanes en relation avec ces objectifs, d’où la rédaction d’un « règlement intérieur » qui les résume, en précisant bien que « Ces voyages, appelés “ caravanes ”,  n’ont rien de commun, tant dans leur conception que dans leurs applications,    avec un tourisme superficiel ou un déplacement destiné à afficher platoniquement de bons sentiments ». S’en suit également une note rappelant les liens entre l’EROM et le Mouvement, insistant sur la nécessité d’une meilleure information interne, mais également sur une plus grande implication des structures… Au passage, on note une allusion aux aléas de cette « cohabitation » : « L’expérience de dix années de fonctionnement montre que le risque n’est pas considérable de voir l’EROM se détacher du Mouvement, comme aurait pu le faire croire la divergence des recrutements, des méthodes et des structures ». L’EROM, activité de prolongement du scoutisme vers un domaine précis, n’a pas échappé à cette difficulté…

 

Le bulletin d’information de l’Équipe des Relations avec l’Outre-Mer de juin 1962 rend compte de cet ensemble de préoccupations, comme en atteste son sommaire. À noter un article du pasteur Roland de Pury, professeur à l’École de théologie protestante de Ndoungue au Cameroun, intitulé « La laïcité indispensable en Afrique »,  qu’il nous a semblé intéressant de présenter car il pose un vrai problème : « … Je me demande qui, mieux que nous, pourrait aider les Africains non pas à guérir, mais surtout à ne pas attraper cette maladie qui est la pire malédiction historique et qui a nom le cléricalisme, c’est-à-dire l’utilisation de la politique par l’Église et l’utilisation de l’Église en politique ». Ce texte affirme même que « la laïcité est le véritable fruit du christianisme pris au sérieux »… Ce même thème de la laïcité est repris dans le numéro de mai 1963 : « On imagine combien la laïcité bien comprise peut-être utile dans les pays d’Outre-mer ! Elle offre un terrain fraternel sur lequel bien des hommes, quelles que soient leurs origines, peuvent se rencontrer pour se libérer de leurs préjugés de caste. Elle constitue même le seul moyen de rassembler dans une même collectivité, qu’ils ‘agisse d’un groupe à l’échelle d’un mouvement de jeunesse ou d’un pays tout entier, des hommes aussi divers que ceux de l’Afrique par leurs ethnies, leurs croyances, leurs traditions et leurs opinions. La liberté politique va de pair avec la liberté spirituelle, et la laïcité est la seule possibilité réelle de coexistence de ce pluralisme. »


Le même bulletin d’information, devenu « Caravanes » en 1963 (avec abonnement spécifique car « la parution sera désormais régulière, nous vous le promettons »), présente les conférences d’information, réalisées ou prévues, à Paris et en province (Mirecourt, Saint-Amand, Bourges, Charentonnay et dans les foyers ruraux de la région de Bourges). Les sujets sont très variables et abordent des aspects très différents :

–   polygamie et évolution sociale,

–   les travailleurs Africains en France,

–   l’animation rurale,

–   la musique africaine,

–   l’effort d’éducation et de développement de l’Algérie,

–   l’économie marocaine,

–   une expérience à Madagascar : l’école rurale,

–   Afrique : la démocratie est-elle possible ?

–   la jeunesse dans la Guinée de 1964,

–   la condition féminine en Afrique…

 

Au passage, notons une activité « culturelle » « pour clôturer agréablement le cycle d’information de l’année 1962-1963 » avec un récital de poésies et de musiques de l’Afrique.

 

En 1963, une note décrivant « l’orientation nouvelle du centre Africain d’Éducation Populaire » fait plusieurs allusions aux « expériences tentées par les quatre Mouvements éducatifs français – Ligue Française de l’Enseignement, Éclaireurs de France, CEMEA, Francs et franches camarades – qui seront étroitement associés au fonctionnement du Centre ». Parmi les « expériences » citées, « le caravane de jeunes Africains et Français effectuant dans une région un chantier ou une mission d’éducation populaire en milieu rural (expérience faite par les Éclaireurs de France dans plusieurs pays d’Afrique occidentale).

 

En février, un « Conseil national » du Scoutisme Français fait le point sur « le scoutisme dans les anciens territoires d’Outre-mer », avec un inventaire des associations « apparentées » aux associations françaises. Il apparaît que certains pays sont « favorables à la pluralité des Mouvements de jeunesse », d’autres sont tentés par une organisation unique. Un problème évoqué est celui des demandes d’affiliation au Scoutisme Mondial. Une conférence du Bureau International avec, pour les E.D.F., la participation de Dominique François, Charles Boganski et Bernard Dumont, est prévue à Genève en mars pour étudier les problèmes de développement du scoutisme en Afrique.