1945 - 1948 : Réflexlon, évolution... et problèmes

Sam24Avr201021:07

1945 - 1948 : Réflexlon, évolution... et problèmes

 Nous avons sélectionné quelques documents qui nous semblent résumer, à la fois, une illustration des difficultés rencontrées par les E.D.F. dans leurs relations avec certains milieux dits "de gauche" et les réflexions qui ont caractérisé cette époque : articles de Jean Estève et Eugène Bourdet, responsables nationaux de la branche Éclaireurs et leurs résultats.


Une illustration des difficultés rencontrées par les E.D.F. dans leurs relations avec certains milieux dits "de gauche"  sont illustrées par un article de Pierre François, mais aussi par un article de la revue "L'Enseignement Public" résumant la thèse d'un ouvrage pour lequel "il ne peut y avoir de scoutisme neutre et laïc"

 

1945 : il paraît que nous sommes fascisés...

Peu de temps après la fin de l’Occupation, quelques mois avant la fin de la guerre, le Mouvement s’est trouvé confronté à quelques difficultés d’interprétation de son action. Il nous a paru intéressant de reproduire un article de Pierre François paru dans «Le Chef» de … février 1945, décrivant très bien le contexte de l’époque en réponse à des attaques en provenance du secteur politique.

« On se défiera toujours des Mouvements de Jeunesse ! Au temps de la « Révolution Nationale », notre anti-conformisme et notre attachement à la liberté soulevaient contre nous des hostilités nombreuses et officielles. À présent, on nous reproche d’être «fascisés». C’est un bon signe, après tout, que d’allumer toujours la méfiance des autorités et des majorités.

Certes, les États totalitaires ont apporté un grand soin à leur jeunesse. Vichy a tenté de les imiter. Mais l’histoire même de ces quatre dernières années prouve que, chez nous, l’expérience «Jeunesse» n’a jamais pu prendre la tournure fasciste ou nazie. La jeunesse française ne s’est jamais laissé imposer le Mouvement unique. De même, elle a refusé l’embrigadement et le dressage au profit d’un homme ou d’une idéologie étatique. Les rares Mouvements créés sous ce sigle n’ont connu ni effectifs ni durée.

Fiasco du fascisme, voilà ce que l’on peut constater chez les grands Mouvements de Jeunesse français. Leur diversité même, la tension salutaire qu’ils maintiennent dans leur vie interne, dans leurs rapports réciproques et dans leurs débats avec l’État, devraient rassurer tous les amis de la liberté. Bien mieux, je les invite à voir dans l’existence et le développement des organisations de jeunesse en France un des rares phénomènes révolutionnaires de notre pays.

Pourquoi les jeunes éprouvent-ils chez nous le besoin de se regrouper ? C’est qu’ils aspirent à la liberté, à la constitution d’une société libre et agissante, libérée de la tutelle d’une famille, d’une école, d’une profession, d’une société où les jeunes n’ont qu’à se taire et s’incliner devant des maîtres et des mandarins.

Veut-on bien me dire quelle part active et intéressante est laissée aux jeunes dans l’entreprise familiale, scolaire ou professionnelle ? Tout se passe, chez nous, comme si garçons et filles étaient quantités négligeables. On les tient pour incapables de penser, de juger et d’agir.

Quoi d’étonnant si, à leur tour, ils se détournent des adultes et constituent des sociétés à part, vrais syndicats de jeunes. Ils se résignent, hélas !, à ne point trouver leur place dans la vie réelle et s’évadent dans un monde à eux, fictif. Dès lors, les graves penseurs qui se gardent bien de se mêler à leurs conversations, à leurs jeux, à leurs travaux, à leurs efforts disparates, auront beau jeu de les accuser de médiocrité et de puérilité. C’est trop commode! Nous sommes, en tous cas, bien loin d’une jeunesse fasciste ou fascisée.

1947 : l'école laïque, la renaissance française, le scoutisme

Autour de 1947 (l’année du Jamboree de la Paix en France), deux brochures sont parues évoquant toutes deux, mais dans des sens différents, les principes et l’action des Éclaireurs de France : "L’école laïque et la renaissance française" et "La duperie du scoutisme".

Eugène Bourdet a retrouvé un article de la revue "l’Enseignement Public" résumant ces deux thèses. Il nous a semblé intéressant de le présenter ici.

Peu de temps après la parution de l’ouvrage "L’école laïque et la renaissance française", écrit par Monsieur Juif, directeur de l’École Normale d’Aix en Provence et grand ami des E.D.F., en particulier pour le secteur Extension, la revue "L’enseignement public" en disait : "Monsieur Juif appartient aux Éclaireurs de France. En tant que tel, il voit dans le scoutisme un des moyens de développer une éducation rationnelle, susceptible de contribuer à la formation harmonieuse de la personnalité des jeunes."

La suite est significative : elle reprend les thèses d’un autre ouvrage contemporain de cette période de réflexion, intitulé "La duperie du scoutisme" et écrit par Marcel Merville, commissaire national aux Vaillants et Vaillantes.

Quelques extraits : "Pour lui, le scoutisme est, en fait, et malgré la bonne volonté de certains dirigeants scouts, au service de la réaction. C’est "l’enfant naturel du paternalisme". Les thèses fondamentales de Baden-Powell ont été reprises par Pétain. Marcel Merville ne reconnaît pas, dans la France travailleuse, ouvrière et paysanne, cette France des scouts :" race vigoureuse, obstinée, de petits propriétaires paysans, de ces villaghes groupés autour de leur église" : conception réactionnaire, maurassienne, opposant la France réelle des scouts de France, artisanale, bucolique, au prolétariat non possédant.

Se basant sur de nombreuses citations, Marcel Merville démontre que le scoutisme, bien loin d’être un instrument de rénovation de nos méthodes éducatives, est un mouvement imprégné de religiosité, au service de la réaction cléricale actuelle, comme elle l’a été hier au service de celle de Vichy. Il ne peut y avoir de scoutisme neutre et laïc. Sous l’aspect de séduisantes techniques pédagogiques, né de l’esprit de conquête des jeunes bourgeois anglais du début du XXème siècle, le scoutisme ne vise qu’à fabriquer en série des Robinsons, à développer le goût de l’évasion. (…) Il y a, certes, quelques techniques pédagogiques intéressantes, mais rien de plus. Ces techniques, qui ne lui sont pas propres, il faut les mettre au service des mouvements progressistes d’enfants et de jeunes".

Bien évidemment, ces commentaires visaient essentiellement les Éclaireurs de France qui s’affirmaient "laïques" : dans la même période, d'autres attaques avaient provoqué la réponse la réponse de Pierre François parue dès 1945. Il n’est peut-être pas inutile de rappeler que ces attaques se situent peu de temps avant que d’autres, reprochant exactement le contraire, conduisent à une scission du Mouvement, également présentée avec les documents de "l’affaire Bertier".


Les réflexions qui ont caractérisé cette époque sont illustrées par articles de Jean Estève et Eugène Bourdet, responsables nationaux de la branche Éclaireurs et leurs résultats : présentation par René Alauzen, commissaire régional et membre du Comité Directeur, des résolutions d'Angoulême et de la coéducation dans la plaquette éditée à l'occasion du Cinquantenaire en 1961.

1947 : le garçon de 1947

Dégageant les conclusions du «premier congrès national des chefs de patrouille Éclaireurs de France», Jean Estève émet quelques constats sur le garçon de 1947 et les façons de répondre à ses besoins, différents de ceux de ses prédécesseurs en Scoutisme. Cet article du «Chef» est intéressant car il permet de situer les préoccupations des responsables nationaux du Mouvement E.D.F. face à une évolution qu’ils ressentent et souhaitent accompagner.

"Il n’est pas trop tôt pour tirer quelques conclusions de ce Congrès qui a été un grand événement pour la branche Éclaireur et pour le Mouvement. Ces conclusions n’ont d’intérêt que si elles préparent et, en quelques façons, préfigurent, notre action future et l’orientation de la Branche pour les années à venir.

Je regrette, oh ! pédagogues indépendants, mais ce Congrès a montré l’importance du Mouvement en tant que tel, l’importance des liens de fraternité qui se nouent grâce au scoutisme entre les garçons de différents coins de France et de l’étranger. On a bien vu que les C.P. ne se considéraient pas comme seulement responsables, chacun individuellement, de sa patrouille, mais encore qu’ils prenaient collectivement leur part de responsabilité dans la destinée de leur Mouvement, et je vous assure qu’ils n’étaient pas portés à la sous-estimer.

On ne répétera jamais assez que le Scoutisme n’est pas seulement une méthode que l’on applique, mais qu’il est aussi un Mouvement de jeunesse, tel que chaque membre participe à la vie de l’ensemble, qu’il se caractérise enfin par un esprit de fraternité développé.

Le Congrès n’a pas pris de décision sur cette question un peu abstraite, mais le souci de cette manifestation, la joie de ses participants, le sérieux des discussions, valent une motion. Les garçons ont envie d’appartenir à un Mouvement vivant et fraternel, ils ne veulent plus de troupes refermées sur elles-mêmes, de ces unités à mince effectif où l’on pratique en rond une amitié rancie, en évitant soigneusement de participer aux activités proposées par la Nation, la province, le District. Ils ne veulent plus de chefs qui ne sont pas au Congrès provincial parce qu’ils ont une «sortie de H.P.» et qui préfèrent à jamais leur camp de troupe aux C.E.P. et à Cappy.

Il convient, à l’heure actuelle, d’insister sur cette question. En effet, le «garçon de 47» n’est pas tout à fait semblable au «garçon d’entre deux guerres» ; il a, comme celui-ci, un grand désir de fraternité, mais il a, en outre, un sens civique plus développé, une maturité plus grande. Sur ce point, la guerre, et tant d’événements malheureux ou exaltants, lui ont apporté une gravité plus accentuée. Cette génération, félicitons-nous-en, sort indemne, dans ce domaine, de toutes influences fascistes, et l’on peut bien augurer des citoyens des années 50.

Mais nous devons répondre à ces désirs, à cette attente, donner aux garçons des responsabilités de plus en plus vastes, les consulter de plus en plus fréquemment, ne plus les amuser avec une fiction qui les ennuie, leur donner du solide, du réel, la participation effective à une Association importante, qui compte dans la vie de la Nation. Aucun C.P. n’a trouvé ridicule d’être reçu par un ministre, ils se sentaient citoyens libres, législateurs souverains, et je vous assure qu’ils critiquaient le Commissariat National avec une aisance que nous avons admirée. La formation du citoyen est un de nos buts principaux, combien de chefs y pensent ? (…) Que chaque chef réfléchisse à leurs propositions, qu’il tire les conclusions qu’il voudra pour sa propre action. Personne, dans le Mouvement, ne peut se permettre de tenir pour négligeable le point de vue des usagers du Scoutisme".

Je prévois une objection facile. J’ai l’air d’oublier que notre Mouvement est dirigé par une hiérarchie de chefs qui, apparemment, n’a rien de démocratique.

En y regardant de plus près, on s’aperçoit que ces cadres, s’ils ne sont pas élus, sont librement acceptés, souvent même désignés, par le groupe auquel s’applique leur autorité. S’ils font preuve d’un autoritarisme apparent, ils ne restent pas longtemps en place. Les chefs d’unité, ces moins de vingt ans, font corps avec leurs garçons. Ils les consultent en permanence et les dirigent dans le sens de leurs aspirations. La règle, c’est-à-dire la discipline et la loi scoutes, ne s’imposent pas lourdement. Elles sont l’objet d’un engagement personnel. Enfin, le rôle du Scoutisme est de lancer constamment les jeunes vers l’action, les initiatives hardies, les prises de responsabilités.

Je ne le dis pas tant à l’adresse de nos détracteurs qu’à nos chefs, afin qu’ils réfléchissent d’avantage à leur mission, qui est de permettre à chaque garçon de devenir un homme par lui-même. Devenir un homme, ce n’est pas l’artère durcie, l’esprit appesanti, le cœur assagi. Et voici, en définitive, le but de nos Mouvements : former des citoyens «jeunes, actifs et utiles». Ayant su exploiter toutes les forces et toutes les richesses de leur jeunesse, ils continuent à les entretenir dans la maturité et jusqu’à la vieillesse. Aux instants décisifs, ils trouveront toujours en eux des ressources de fraîcheur, d’énergie et de générosité. Nous éduquons d’authentiques révolutionnaires.

Dans un pays où les vieillards prudents et les fonctionnaires peureux occupent tant de place et paralysent tant d’élans, les Mouvements de Jeunesse préparent des générations vivantes et bousculantes».

Remarque : ce texte a été écrit vingt-trois ans et trois mois avant … mai 68 !

1948 : l'éducation d'un citoyen dans une société donnée

Eugène Bourdet, après avoir exercé des responsabilités d’animation en Vendée puis en Poitou - Charentes, devint en 1953 l’adjoint d’Henry Gourin, alors Commissaire National branche Éclaireurs, puis, de 1954 à 1961, responsable de la branche. Ensuite, il fut membre associé du Commissariat National de Jean Estève. Il nous apporte une réflexion importante sur la genèse des évolutions du Mouvement. Ce texte est extrait de la plaquette consacrée à Jean Estève.

" Septembre 1948. À Angoulême se déroulent en parallèle le congrès provincial de Poitou-Charentes et les journées de la branche Éclaireurs, qui rassemblent les responsables provinciaux - parmi lesquels Paul Puaux (Provence), Jacques Roux (Languedoc-Roussillon) et Roland Dhordain (Paris) – autour de Pierre François et des commissaires nationaux, Henry Gourin et son jeune adjoint Jean Estève.

Assistant tout neuf au Commissaire départemental de Vendée pour la branche Éclaireurs, je n’ai pas participé à l’ensemble de ces journées, mais on imagine bien que, même dans le décor médiocre de ces baraques - salles de classe, cette rencontre avec les «grands chefs» était pour nous un événement. A vrai dire, Henry Gourin, qui nous présenta, toutes fraîches, les conclusions ou «résolutions» lors de notre réunion de branche, le fit avec une telle force de persuasion, un tel enthousiasme, que ceux qui n’avaient pas vécu ces journées de l’intérieur ne pouvaient soupçonner le rôle qu’y avait joué Jean Estève. Cependant, le regard, le sourire, parfois narquois, de l’A.C.N.E. m’avaient frappé.

Je puis témoigner que ces textes nous parurent fort intéressants, mais, aussi, surprenants pour nous qui venions de clore notre camp – école et n’étions pourtant nullement au courant de leur gestation. En relisant les articles des revues qui accompagnèrent la diffusion des quatre pages présentant les résolutions, je me demande s’ils éclairèrent beaucoup les chefs de troupe qui, comme nous, les découvrirent. D’où des hésitations et des oppositions, voire des incompréhensions.

Cependant, cinq années plus tard, devenu adjoint d’Henry Gourin C.N.E., je pus constater que le problème de la justification et de l’application de ces textes paraissait ne plus se poser. Aussi, ce n’est assurément pas par hasard qu’en octobre 1946 et, curieusement, dans «l’’Éclaireur de France», mensuel des garçons - et non dans «le Chef», revue des cadres, que paraît un long compte-rendu d’un voyage d’études de Charles Celier, «l’International » des Scouts de France, chez les Boys - Scouts of America. L’auteur y marque particulièrement sa surprise et son intérêt pour la vie démocratique de la patrouille ; là-bas, tout part, réellement, des garçons, à cent lieues de ce «troupisme» que nous connaissions souvent dans nos Mouvements et, surtout, du peu de responsabilité, d’autonomie que trop de chefs accordaient aux jeunes.

Décembre 1946, c’est à nouveau dans «l'Éclaireur de France» - plus exactement, dans «l’Écho des Pats», le supplément destiné aux chefs de patrouille, que commence à paraître une sélection des opinions avancées au Congrès national des C.P., puis des vœux formulés par ceux-ci, au cours d’une rencontre qui avait à la fois démontré la faiblesse de notre pratique éducative et éclairé les réorientations à envisager : par exemple, des programmes d’activités, des projets de camps d’été préparés en commun par les garçons et les responsables. Ces appels pour un retour aux sources montraient à quel point des pratiques autoritaires avaient occulté la véritable nature de l’animation des unités.

Mars 1947 : l’Assemblée Générale adopte les nouveaux statuts : «laïque comme l’école publique», le Mouvement se donne «pour objectif final de former des citoyens conscients des problèmes sociaux et soucieux de les résoudre».

Les idées de Freinet, les expériences de nos amis de second degré, les enseignements du Congrès des C.P. font apparaître la nécessité de modifier le fonctionnement des unités, et leurs activités, pour que les garçons puissent vivre une société démocratique, assumer de choix, leur originalité, leur responsabilité. Ainsi sont guidées les réflexions et les expériences des assistants de branche dans les provinces. Et c’est Gabriel Pannoux, de Belfort, qui va rédiger, à la demande de Jean Estève, le rapport, passablement iconoclaste, à partir duquel on élaborera les textes des résolutions.

Mais il me paraît qu’un événement a joué un rôle dans notre évolution. Un événement du monde scout français qui, à ma connaissance, ne fut alors débattu dans notre Mouvement, ni même évoqué. En effet, à la période même où les E.D.F. s’engagent dans cette recherche d’adaptation afin de contribuer à une éducation de citoyens plus libres, plus autonomes, l’association des Scouts de France prend, elle aussi, un virage très important qui va la marquer jusqu’en 1963.

En automne 1947, après un magnifique Jamboree de la Paix dont certains aspects les avaient cependant engagés à réfléchir sur l’avenir des Mouvements, les Commissaires Généraux, unanimes, avaient appelé au retour à un «scoutisme simple»….

Un an plus tard, les S.D.F, comme les E.D.F, sont tenus de prendre en compte les faiblesses de leur branche moyenne : évasion des garçons les plus âgés, autoritarisme de chefs trop jeunes et insuffisamment formés, ossification des techniques, des «grands jeux», etc… Comme les E.D.F, l’association catholique est amenée à mettre en place une transformation quasi radicale de la branche moyenne. Mais elle veut fonder cette transformation sur une vaste ambition : «Que voulons-nous changer dans le monde ?» interroge l’aumônier général (le Chef, Chamarande 1948, n° 249). Et c’est en fonction de cette interrogation mais aussi des déficiences relevées plus haut que Michel Menu, C.N.E., dévoile le projet «Raiders Scout ».

Les Raiders ! Menu, avec un style parfois prophétique, lance une proposition assurément passionnante mais qui, assez rapidement, en dépit de la présence, alors systématique, d’aumôniers de troupe et de «scoutmestres» mieux formés, va surprendre, puis choquer et inquiéter, au sein même de l’Association. La référence aux «commandos» de Wingate, la prière des paras mais, surtout, la tension constante, la recherche d’une qualification manifestement très supérieure à celle du commun des scouts «ordinaires», vont trop souvent mener à des «exploits» excessifs comme à un orgueil que n’apaisait point la référence à l’article 4. Même si elle n’avait rien de commun avec les dérives dénoncées en 98 et 99, cette ambition de forger des «chevaliers modernes», cette formation d’un certain type d’homme, à l’évidence ne pouvait correspondre à l’esprit ni à la finalité qui étaient alors ceux de notre Mouvement, engagé dans l’éducation à une société où le plus grand nombre devrait pouvoir accéder à l’autonomie mais, également, à la responsabilité.

Ainsi, au même moment, affrontant des difficultés semblables, deux associations choisissaient des voies assez radicalement différentes. Mais, et nous le voyons bien en cette année 99, n’est-ce pas, tout simplement, que le Scoutisme, s’il est, d’abord, un jeu passionnant pour les jeunes auxquels il offre une société et des rôles à leur mesure, n’en reste pas moins, aux yeux du responsable qui choisit de s’y engager, une contribution à l’éducation d’un citoyen dans une société donnée. Et c’est précisément le but que B.P. lui avait fixé ! Encore faut-il essayer de voir le plus clairement possible ce que pourrait être cette cité pour laquelle on va travailler. Et ce que pouvait être ce citoyen. Peut-être eut-il fallu le dire et le redire plus souvent dans les années 47 – 50 où, probablement, bien des cadres ne comprenaient pas assez bien les orientations de Gustave Monod et de Pierre François".


1961 : les deux fondamentaux de l'après-guerre

La région parisienne, en charge de la réalisation et de la diffusion de la "plaquette du Cinquantenaire", en 1961, a demandé à quelques "grands chefs" leur témoignage sur les événements majeurs de la vie du Mouvement. René Alauzen, alors Commissaire Régional et membre du Comité Directeur, y a traité des deux "fondamentaux" de cette après-guerre. Nous reproduisons ses deux contributions.


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