1920 : L'évolution des Éclaireurs Français - L’installation d’un scoutisme « authentique » mais Français

Jeu29Déc201109:24

1920 : L'évolution des Éclaireurs Français

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Les Éclaireurs Français sont, dans les débuts, représentés par des cartes postales dans des situations d’activités de caractère très « militaire » et, d’ailleurs, ils ne se différencient pratiquement pas, sur ce plan, de la représentation donnée des Éclaireurs de France. Il est d’ailleurs quelquefois difficile d’identifier l’association, ou plus exactement la fédération, car les troupes sont déclarées localement. C’est ainsi que sur des cartes présentant les activités des « Éclaireurs de Saint-Denis », seule une pancarte fièrement brandie permet d’identifier les « Boys-scouts de France », sous-titre habituel des Éclaireurs Français.

Cette nouvelle activité proposée à la jeunesse est d’ailleurs portée par une « promotion » dont les cartes postales ne sont qu’un exemple : c’est ainsi que le roman « Les derviches tueurs », de Jean de la Hire, imprimé en décembre 1913, présente, page 128, un appel sans équivoque : «  Pour être boy-scouts... vous tous, les jeunes... si vous voulez devenir des hommes forts au moral et au physique, enrôlez-vous sans tarder aux Eclaireurs Français (Boy-Scouts de France). Ayez au moins 10 ans et soyez d'une bonne constitution physique... Vivent les Boy-Scouts de France ! ».

En juin 1912, une conférence du Docteur Nicaise, secrétaire de la Ligue d’Éducation Nationale, insiste sur le lien étroit entre l’enseignement secondaire et le scoutisme. La première partie en est consacrée aux lycées et à l’enseignement qu’ils apportent, pour traiter « du respect qui est dû aux maîtres de l’enseignement secondaire », la deuxième partie évoque « les précieuses qualités de la jeunesse », la troisième partie présente le scoutisme, ses origines et ses propositions. Remarquons que le Recteur Liard – membre important de la réunion d’octobre 1911 à la Sorbonne où il représentait l’Université – devait participer à cette conférence mais avait été « retenu à la section permanente du Conseil Supérieur de l’Instruction Publique ».

Il est clair que, pendant les premières années, les deux fédérations ne se différencient pas beaucoup, chacune d’elles cherchant son propre développement par ses propres relations. Les Éclaireurs Français semblent bénéficier d’un certain avantage avec cet appui de l’Université apporté après la création des Éclaireurs de France.

La période de la guerre semble avoir été vécue de la même façon par les deux associations, et l’évolution se situera surtout dans la période qui va suivre, c’est-à-dire dans les années 20.

On peut situer la spécificité des Éclaireurs Français dans un document, apparemment publié en 1920, intitulé « Ce que doit savoir et faire un Éclaireur Français ». L’en-tête est celle de la Ligue d’Éducation Nationale, sous-titrée « Éclaireurs Débrouillards » (terme apprécié par Coubertin !). En exergue, « Dans un corps endurci et assoupli par le sport, un cerveau bien équilibré et un cœur pur ». Autrement dit, le scoutisme est une des composantes de la formation du jeune, ce qui est confirmé par le verso de la brochure, qui inventorie des documents :

-   Revue Mensuelle d’ Éducation Nationale, organe de la Ligue,

-   La gymnastique utilitaire, par le Baron Pierre de Coubertin,

-   Les Boy-Scouts, par Paul Vuibert,

-   Une campagne de vingt et un ans, les batailles de l’Éducation Physique, par P. de Coubertin,

-   Les martyrs de l’aviation.

On retrouve ici l’affirmation du document de présentation de la Ligue : « La L.E.N. n’est point uniquement une société de scoutisme. Elle poursuit des buts plus généreux. »

Apparemment, dès cette date, les dés sont jetés, les structures commencent à exister. Cela signifie-t-il qu’une réelle concurrence existait à l’échelon local ? Nous n’en avons pas trouvé d’autres traces, mais c’est très vraisemblable. Par contre, on trouve des exemples de passage d’unités E.D.F. aux Éclaireurs Français suite à des divergences d’ordre « pédagogique » : c’est ainsi que le « chef Frugier » du groupe de Limoges, dans les années 30, sera en désaccord sur l’orientation des E.D.F. qu’il trouve « trop scolaire » et rejoindra les E.F. après avoir pris contact avec les « Chevaliers de France ». Nouvelle démonstration de la toute-puissance des responsables locaux…. Le groupe E.F. de Limoges sera un des plus importants de métropole ; il continuera d’ailleurs à affirmer son propre scoutisme en refusant en 1964 la fusion créant le nouveau Mouvement des E.E.D.F. pour se tourner d’abord vers les Éclaireurs Neutres de France puis vers les Éclaireurs Neutres Européens, dissidence des précédents, avec une association locale dénommée « Éclaireurs Neutres du Limousin » avant de rejoindre la Fédération des Éclaireuses et des Éclaireurs. Cette épopée est décrite par Olivier Pécaud dans un très intéressant ouvrage publié en 1999 par Jean Sabaut sur l’histoire des E.D.F. en Poitou-Charentes.

Le refus de l’adhésion au « Bureau de Londres » et l’isolement qui en a résulté ont certainement des conséquences sur l’intégration des Éclaireurs Français dans l’ensemble des Mouvements de Jeunesse et leur reconnaissance par les pouvoirs publics. Il semble qu’une tentative de rapprochement avec les E.D.F. ait échoué dans les années 20. Les autres associations opposeront par exemple, en 1941, un refus catégorique à la demande des Éclaireurs Français de rejoindre le Scoutisme Français, reconnu et aidé par les ministères de l’époque.

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