1957-1962 : L'Algérie - Les réponses du Mouvement

Lun26Avr201007:47

1957-1962 : L'Algérie

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Le commentaire des dirigeants : retours difficiles (Louis François et Jean Estève)

Le témoignage lucide et courageux de Michel Capestan doit être lu et médité par tous nos cadres et, plus particulièrement, par les cheftaines et les plus de trente ans.

Il est trop facile de se détourner des spectacles déplaisants et d’ignorer, par souci de confort, les problèmes de tant de jeunes. Puisque nous n’avons pas été capables de leur éviter cela, au moins aidons-les quand ils rentrent. Le Mouvement y gagnera peut-être des cadres, ne nous en plaignons pas. Mais nous devons surtout comprendre, filles, femmes et cadres plus âgés, que c’est d’abord un acte de justice, un geste d’amitié que nous avons à accomplir.

Éditorial : le Mouvement et la vie du pays (Jean Estève)

Nous savons tous que le jeu scout est préparation à la vie et, si nous consacrons tout le temps dont nous pouvons disposer au mouvement, c’est parce que nous sommes profondément persuadés que nos activités ont une grande valeur éducative et qu’il est important de préparer, pour l’avenir, selon la formule de B.-P., des citoyens et citoyennes « joyeux, actifs, utiles .

Tous ceux, toutes celles, qui participent à cette action, en contact direct avec les enfants et les jeunes, ont la meilleure part du travail scout, mais aussi la plus importante : il faut qu’ils le sachent et qu’ils mesurent leurs responsabilités, l’obligation qui est la leur de répondre aux besoins des jeunes, de garder le contact et de se perfectionner sans cesse, pour mieux remplir cette tâche si importante.

Mais nous savons aussi que cette action ne serait pas efficace si elle s’accomplissait en ordre dispersé, qu’il faut que les efforts soient coordonnés pour en améliorer le rendement. C’est la raison d’être du Mouvement, et de ses structures, de cette activité multiple des commissaires aux spécialisés, aux responsabilités territoriales diverses. Ils n’ont pas la chance, eux, d’être en contact avec les Louveteaux, les Eclaireurs, les Eclaireuses, les Routiers et les Aînées ; mais c’est pour eux qu’ils travaillent, et pour tous ceux qui ne peuvent connaître encore la joie d’une sortie ou d’un camp … Nous éprouvons tous, quotidiennement, combien il est enrichissant d’appartenir à cette communauté vivante, cimentée de chaude amitié et de joies partagées.

Le Mouvement est un, mais il n’est pas seul, et nous savons que nous sommes intégrés dans la vie française et, plus étroitement chaque jour, dans la vie de l’univers entier. Nous avons constaté, nous constatons, par expérience, que les événements politiques et sociaux retentissent sur notre action éducative, et qu’il ne nous est pas possible de créer une oasis artificielle où nous poursuivrions notre œuvre avec les garçons et les filles sans rien vouloir connaître de ce qui se passe autour de nous. (…)

En cette fin de 1961, les événements nous bousculent, et la prolongation de la guerre d’Algérie rend manifeste l’atteinte de la communauté française par deux graves maladies dont, en tant qu’E.D.F., nous ne pouvons pas nous désintéresser, car toute notre action, depuis toujours, vise à en prémunir les jeunes : le racisme et le recours à la violence comme substitut des formes légales dans l’ordre juridique (tortures) comme dans l’ordre politique («plastic»). Avec le GEROGEP (motion communiquée à la presse le 20 décembre), avec plusieurs autres organisations (motion du 5 janvier), nous avons pris position en tant que Mouvement. Nous ne pouvions agir autrement face à de graves menaces : la notion d’ouverture à tous, fondamentale pour nous E.D.F. exclut tout racisme, implique le respect d’autrui, et condamne le recours à la violence, dégradant pour qui s’y abandonne et déshonorant pour un groupe national qui le tolère dans des factions ou des corps constitués : nous n’avons pas attendu la jurisprudence de Nuremberg pour l’affirmer dans notre action quotidienne.

Prendre position, c’est désigner l’obstacle : il nous reste maintenant, par nos activités, à prémunir efficacement les garçons et les filles contre les dangers qu’ils courent. Pas de grands discours, mais un effort d’imagination qui fasse sentir à des enfants, qui ne sont ni lâches ni égoistes, ce qui est en question . (…)

Voilà ce que signifient nos récentes prises de position ; nous restons nous-mêmes, fidèles à un idéal, fidèles à la jeunesse de notre pays. Car c’est pour elle que nous témoignons.

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